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-- LES 70 ANS DE L'OTAN:
DE
GUERRE EN GUERRE.
DOCUMENTATION PRÉSENTÉE PAR LE CNGNN À LA CONFÉRENCE
INTERNATIONALE SUR LE 70 ANS DE L'OTAN, FLORENCE, LE 7 AVRIL 2O19
1. L’Otan naît de la
Bombe
2. Dans
l’après-guerre froide l’Otan se rénove
3. L’Otan démolit la
Yougoslavie
4. L’Otan s’étend à
l’Est vers la Russie
5. USA et Otan
attaquent l’Afghanistan et l’Irak
6. L’Otan démolit
l’État libyen
7. La guerre
USA/Otan pour démolir la Syrie
8. Israël et émirs
dans l’Otan
9. La gestion
USA/Otan dans le coup d’état en Ukraine
10. L’escalade
USA/Otan en Europe
11. Le porte-avions
Italie sur le front de guerre
12. USA et Otan
rejettent le Traité ONU et déploient en Europe de nouvelles armes nucléaires
13. USA et Otan
enterrent le Traité FNI
14. L’empire
Américain d’Occident joue la carte de la guerre
15. Le système
planétaire USA/Otan
16. Pour sortir du système de
guerre sortir de l’Otan
1.
L’Otan naît de la Bombe
Les
événements qui préparent la naissance de l’Otan commencent avec le bombardement
atomique d’Hiroshima et Nagasaki, effectué par les États-Unis en août 1945 non
pas pour battre le Japon, désormais à genoux, mais pour sortir de la Deuxième
guerre mondiale avec le plus grand avantage possible surtout sur l’Union
Soviétique. Cela est rendu possible par le fait que, à ce moment-là, les
États-Unis sont les seuls à posséder l’arme nucléaire.
Un mois seulement après le bombardement
d’Hiroshima et Nagasaki, en septembre 1945, on calcule déjà au Pentagone qu’il
faudrait environ 200 bombes nucléaires contre un ennemi des dimensions de
l’URSS. Le 5 mars 1946, le
discours de Winston Churchill sur le “rideau de fer” ouvre officiellement la
guerre froide. Immédiatement après, en juillet 1946, les USA effectuent les
premiers essais nucléaires dans l’atoll de Bikini (Îles Marshall, Océan
Pacifique) pour en vérifier les effets sur un groupe de navires en désarmement
et des milliers de cobayes. Participent à l’opération plus de 40 mille
militaires et civils étasuniens, avec plus de 250 navires, 150 avions et 25
mille détecteurs de radiations.
En
1949 l’arsenal étasunien passe à environ 170 bombes nucléaires. Les États-Unis
sont alors sûrs de pouvoir, en peu de temps, avoir assez de bombes pour
attaquer l’Union Soviétique. En cette même année, cependant, échoue le plan
étasunien de garder le monopole des armes nucléaires. Le 29 août 1949, l’Union
Soviétique effectue sa première explosion expérimentale. Quelques mois avant,
le 4 avril 1949, quand à Washington on sait désormais que l’Union Soviétique
aussi est sur le point d’avoir la Bombe et que la course aux armements
nucléaires va donc commencer, les États-Unis créent l’Otan. L’Alliance sous
commandement étasunien comprend pendant la guerre froide seize pays :
États-Unis, Canada, Belgique, Danemark, France, République Fédérale Allemande,
Grande-Bretagne, Grèce, Islande, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas,
Portugal, Espagne, Turquie. À
travers cette alliance, les États-Unis gardent leur domination sur les alliés
européens, en utilisant l’Europe comme première ligne contre l’Union
Soviétique.
Six ans après l’Otan, le 14 mai 1955, naît le Pacte de Varsovie,
comprenant Union Soviétique, Bulgarie, Tchécoslovaquie, Pologne, République
Démocratique Allemande, Roumanie, Hongrie et Albanie (cette dernière de 1955 à
1968).
Tandis
que commence la confrontation nucléaire entre USA et URSS, la Grande-Bretagne
et la France, toutes deux membres de l’Otan, oeuvrent pour se doter elles aussi
d’armes nucléaires. La première à y arriver est la Grande-Bretagne qui en 1952
effectue en Australie une explosion expérimentale. L’avantage de l’Otan
augmente ensuite quand, le 1er novembre de la même année, les États-Unis font
exploser leur première bombe H (à l’hydrogène). En 1960 les pays Otan en
possession d’armes nucléaires passent à trois, quand la France fait exploser en
février, dans le Sahara, sa première bombe nucléaire.
Tandis que la course aux armements nucléaires
est en plein développement, éclate en octobre 1962 la crise des missiles à Cuba
: après l’invasion armée ratée de l’île en avril 1961, opérée par des réfugiés
cubains soutenus par la CIA étasunienne, l’URSS décide de fournir à Cuba des
missiles balistiques à portée moyenne et intermédiaire. Les États-Unis
effectuent le blocus naval de l’île et mettent en alerte leurs forces
nucléaires : plus de 130 missiles balistiques intercontinentaux sont prêts au
lancement ; 54 bombardiers ayant à bord des armes nucléaires viennent s’ajouter
aux 12 que le Commandement aérien stratégique garde toujours en vol,
vingt-quatre heures sur vingt-quatre, prêts à l’attaque nucléaire. Les
Etats-Unis disposent à ce moment-là de plus de 25.500 armes nucléaires,
auxquelles s’ajoutent environ 210 britanniques, tandis que l’URSS en possède
environ 3.350. La crise, qui conduit le monde au seuil de la guerre nucléaire,
va être désamorcée par la décision soviétique de ne pas installer les missiles,
en échange de l’engagement étasunien de lever le blocus et de respecter
l’indépendance de Cuba.
Dans la même période, la Chine se dirige
vers l’acquisition d’armes nucléaires et, en octobre 1964, fait exploser sa
première bombe à l’uranium et, moins de trois ans après, sa première bombe H.
Parallèlement à la croissance de son propre
arsenal, le Pentagone met au point des plans opérationnels détaillés de guerre
nucléaire contre l’URSS et la Chine. Un dossier de 800 pages -rendu public en
2015 par les archives du gouvernement étasunien- contient une liste (jusque là
top secret) de milliers d’objectifs en URSS, Europe Orientale et Chine que les
USA se préparaient à détruire avec des armes nucléaires pendant la guerre
froide. En 1959, l’année à laquelle fait référence la “target list”, les USA
disposent de plus de 12.000 têtes nucléaires plus environ 80 britanniques,
alors que l’URSS en possède environ mille et la Chine n’en a pas encore. Étant supérieur aussi en vecteurs (bombardiers et
missiles), le Pentagone juge faisable une attaque nucléaire.
Chez les stratèges de Washington -racontera ensuite Paul Johnstone, qui
fut pendant deux décennies (1949-1969) analyste du Pentagone pour la
planification de la guerre nucléaire- il y a dans cette période une conviction
que les États-Unis, bien que subissant dans un échange nucléaire de graves
dégâts et de nombreux millions de morts, continueraient à exister comme nation
organisée et vitale, et l’emporteraient enfin, tandis que l’Union Soviétique ne
serait pas en mesure de le faire.
Entre la fin des années Soixante et le début des années Soixante-Dix,
les USA ont environ 9.000 armes nucléaires déployées hors de leur propre
territoire : environ 7.000 dans les pays européens de l’Otan, 2.000 dans des
pays asiatiques (Corée du Sud, Philippines, Japon). En plus de celles-ci, ils
ont 3.000 armes à bord de sous-marins et autres unités navales, qu’ils peuvent
à tout moment lancer, depuis leurs positions avancées, contre l’Union
Soviétique et d’autres pays. L’URSS, qui n’a pas de bases avancées hors
de son propre territoire à proximité des États-Unis (dont elle peut cependant
s’approcher avec ses sous-marins nucléaires), essaie de démontrer que, si elle
était attaquée, elle pourrait lancer des représailles dévastatrices. Pour
preuve elle fait exploser, dans un essai effectué le 20 octobre 1961, la plus
puissante bombe à hydrogène jamais expérimentée, la “Zar” de 58 mégatonnes,
équivalente à presque 4.500 bombes d’Hiroshima. L’Union Soviétique prépare en même temps une arme
spatiale : un missile qui, s’il était mis en orbite autour de la Terre,
pourrait atteindre à tout moment les États-Unis avec une tête nucléaire.
À ce moment-là, les États-Unis, mis en difficulté, proposent à l’Union
Soviétique un traité sur l’usage pacifique de l’espace. Ainsi est signé, en
janvier 1967, le Traité sur l’espace externe, qui interdit la mise en place
d’armes nucléaires dans l’orbite terrestre, sur la Lune ou sur d’autres corps
célestes, ou, en tous cas, leur mise en place dans l’espace
extra-atmosphérique.
Immédiatement après, en juillet 1968, est stipulé le Traité de
non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Il est promu par États-Unis,
Grande-Bretagne et Union Soviétique, préoccupés par le fait que d’autres pays
veulent entrer dans le cercle des puissances nucléaire. L’Article
1 stipule : “Tout État doté d'armes nucléaires qui est Partie au Traité
s'engage à ne transférer à qui que ce soit, ni directement ni indirectement,
des armes nucléaires”. L’Article 2 stipule : “Tout État non doté d'armes
nucléaires qui est Partie au Traité s'engage à n'accepter de qui que ce soit,
ni directement ni indirectement, le transfert d'armes nucléaires ou autres
dispositifs nucléaires ou du contrôle de telles armes”. Les puissances
nucléaires s’engagent à poursuivre des négociations sur un Traité de désarmement
général et complet sous contrôle international (Art. 6). L’Italie signe le TNP
en 1969 et le ratifie en 1975.
Pendant qu’États-Unis, Grande-Bretagne et
Union Soviétique essaient d’empêcher par le Traité de non-prolifération que
d’autres pays n’entrent dans le club nucléaire, dont font partie cinq membres
en 1968, un sixième pays s’infiltre dans le cercle des puissances nucléaires en
réussissant non seulement à y entrer mais, une fois dedans, à se rendre
officiellement invisible : l’invité de pierre est Israël. Au moment même où, en
1968, est ouvert à la signature le Traité de non-prolifération, Israël est déjà
en train de déployer en secret ses premières armes nucléaires. Dans les années
Soixante et Soixante-Dix l’Afrique du Sud, l’Inde et le Pakistan commencent
aussi à construire des armes nucléaires. En 1986 l’arsenal mondial grimpe à son plus haut
niveau : environ 65. 000 armes nucléaires.
C’est dans cette phase que l’Europe est transformée en première ligne de
la confrontation nucléaire entre les deux super-puissances. Entre
1976 et 1980 l’URSS déploie sur son territoire des missiles balistiques de
portée intermédiaire. Se fondant sur le fait que depuis le territoire
soviétique ils peuvent frapper l’Europe occidentale, l’Otan décide de déployer
en Europe, à partir de 1983, des missiles nucléaires étasuniens à portée
intermédiaire : 108 missiles balistiques Pershing 2 en Allemagne et 464
missiles de croisière (Cruise) lancés du sol, distribués entre Grande-Bretagne,
Italie, Allemagne occidentale, Belgique et Pays-Bas.
En
moins de 10 minutes du lancement, les Pershing 2 étasuniens stockés en
Allemagne peuvent frapper les bases et villes soviétiques, Moscou comprise,
avec leurs têtes nucléaires. En même temps, les missiles de croisière
étasuniens stockés à Comiso et dans d’autres bases européennes, volant à
vitesse subsonique à une altitude de quelques dizaines de mètres le long du
relief du sol, peuvent échapper aux radars et atteindre les villes soviétiques.
À leur tour, les SS-20 stockés en territoire soviétique peuvent atteindre, en à
peine plus de 10 minutes du lancement, les bases et villes de l’Europe
occidentale.
En Italie, au milieu des années 80, en plus
de 112 têtes nucléaires sur les missiles de croisière stockés à Comiso, se
trouvent d’autres armes nucléaires étasuniennes pour un total estimé à environ
700. Elles sont constituées en majorité de mines de démolition atomique,
projectiles nucléaires d’artillerie et missiles nucléaires à courte portée,
destinés à êtres utilisés sur le territoire italien. Ceci indique que l’Italie
est considérée par les États-Unis comme un simple pion à sacrifier, un terrain
de bataille nucléaire transformer en désert radioactif.
Pendant la guerre froide, de 1945 à 1991, on
accumule dans le monde un arsenal nucléaire qui, dans les années Quatre-Vingt,
atteint probablement les 15.000 mégatonnes, équivalant à plus d’un million de
bombes d’Hiroshima. C’est comme si chaque habitant de la planète était assis
sur 3 tonnes de tritium. La puissance de l’arsenal nucléaire dépasse de 5.000
fois celle de tous les engins explosifs utilisés dans la Seconde guerre
mondiale. On crée, pour la première fois dans l’histoire, une force
destructrice qui peut effacer de la surface de la Terre, non pas une mais
plusieurs fois, l’espèce humaine et presque toute autre forme de vie.
2. Dans l’après-guerre froide l’Otan se rénove
Dans
la seconde moitié des années Quatre-Vingt le climat de la guerre froide
commence à changer. Le premier signal de dégel est le Traité sur les forces
nucléaires intermédiaires (INF), signé à Washington le 8 décembre 1987 par les
présidents Reagan et Gorbachev : sur la base de celui-ci les États-Unis et
l’Union Soviétique s’engagent à éliminer tous les missiles de cette catégorie,
y compris les Pershing 2 et les Cruise basés par les USA dans des pays
européens de l’Otan et les SS-20 basés par l’URSS sur son propre territoire.
Jusqu’en mai 1991, ce sont, au total, 2.692 missiles de cette catégorie qui
seront éliminés.
Cet important résultat est dû
substantiellement à l’”offensive du désarmement” lancée par l’Union Soviétique
de Gorbachev ; le 15 janvier 1986, elle propose non seulement d’éliminer les
missiles soviétiques et étasuniens à portée intermédiaire, mais de réaliser un
programme d’ensemble, en trois phases, pour la mise au ban des armes nucléaires
pour l’an 2000. On sait à Washington
que Gorbachev veut vraiment la complète élimination de ces armes. Mais on sait
aussi que dans le Pacte de Varsovie et dans l’Union Soviétique-même est en
marche un processus de désagrégation, processus que les États-Unis et leurs
alliés favorisent par tous les moyens possibles.
Après l’écroulement du Mur de Berlin en novembre 1989, c’est en juillet
1991, la dissolution du Pacte de Varsovie : les six pays de l’Europe
centre-orientale qui en faisaient partie ne sont alors plus alliés de l’URSS. En
décembre 1991 c’est l’Union Soviétique qui se dissout : à la place d’un État
unique s’en forment quinze. La
disparition de l’Union Soviétique et de son bloc d’alliances crée, dans la
région européenne et centre-asiatique, une situation géopolitique entièrement
nouvelle. Simultanément, la désagrégation de l’URSS et la profonde
crise politique et économique qui investit la Fédération Russe marquent la fin
de la super-puissance qui était en mesure de rivaliser avec celle des USA.
Les États-Unis profitent immédiatement de la
“détente” en Europe pour concentrer leurs forces dans l’aire stratégique du
Golfe Persique où, par une habile manoeuvre, ils préparent les conditions pour
déclencher ce que le Pentagone définit comme “le premier conflit de
l’après-guerre froide, un événement déterminant dans le leadership mondial des
États-Unis”. Le 17 janvier 1991 est lancée contre l’Irak “la plus intense
campagne de bombardement de l’histoire” : en 43 jours l’aviation étasunienne et
alliée (dont celle de l’Italie) largue, avec 2.800 avions, environ 250.000
bombes, dont celles à fragmentation qui diffusent au total plus de 10 millions
de sous-munitions, tandis que les canonnières volantes, les hélicoptères et les
chars d’assaut tirent plus d’un million de projectiles à l’uranium appauvri. Le
23 février les troupes de la coalition, comprenant plus d’un demi-million de
soldats, lancent l’offensive terrestre qui, après cent heures de carnage, prend
fin le 28 février avec un “cessez-le-feu temporaire” proclamé par le président
Bush.
L’Otan, bien que ne participant pas en tant
que telle à la guerre du Golfe, fournit l’appui de toute son infrastructure aux
forces de la coalition. Participent aux bombardements, aux côtés des
Étasuniens, des forces aériennes et navales britanniques, françaises, italiennes,
grecques, espagnoles, portugaises, belges, hollandaises, danoises, norvégiennes
et canadiennes, et que des forces britanniques et françaises participent à
l’offensive terrestre avec les Étasuniens.
La nouvelle stratégie va être officiellement
énoncée, six mois après la fin de la guerre du Golfe, dans la National Security
Strategy of the United States (Stratégie de la sécurité nationale des
États-Unis), publiée par la Maison Blanche en août 1991. Le Concept central est que “les États-Unis demeurent le
seul État avec une force, une portée et une influence en toute dimension
-politique, économique et militaire- réellement mondiales : […] il n’existe
aucun substitut au leadership américain. Notre responsabilité, dans la
nouvelle ère aussi, est d’importance centrale et inéluctable”.
Un document du Pentagone, rédigé en février
1992 précise que “notre objectif premier est d’empêcher la ré-émergence d’un
nouveau rival, sur le territoire de l’ex-Union Soviétique soviétique ou
ailleurs, qui puisse être une menace de l’ordre de celle posée précédemment par
l’Union Soviétique. La nouvelle stratégie requiert que nous opérions pour
empêcher que toute puissance hostile ne domine une région dont les ressources,
si elles étaient étroitement contrôlées, suffiraient suffisantes pour engendrer
une puissance mondiale”. Cette stratégie sera adoptée dans les “régions
critiques pour la sécurité des États-Unis, lesquelles comprennent l’Europe,
l’Asie orientale, le Moyen-Orient, l’Asie sud-occidentale et le territoire de
l’ex-Union Soviétique. Nous avons en jeu d’importants intérêts aussi en
Amérique Latine, Océanie et Afrique subsaharienne”.
“Une question clé -souligne la Maison
Blanche dans la National Security Strategy 1991- est [de savoir] comment le
rôle de l’Amérique de leader de l’Alliance, et en réalité nos alliances mêmes,
seront influencés, spécialement en Europe, par la réduction de la menace
soviétique. […] Les différences entre les alliés deviendront probablement plus
évidentes au fur et à mesure que décroîtra la traditionnelle préoccupation sur
la sécurité qui les a fait s’unir au départ”. En d’autres termes : les alliés
européens pourraient faire des choix divergents de ceux des États-Unis, en
mettant en question le leadership étasunien ou même en sortant de l’Otan,
désormais dépassée par la nouvelle situation géopolitique. Il est donc de la
plus grande urgence pour les États-Unis de redéfinir non seulement la
stratégie, mais le rôle même de l’Otan.
Le 7 novembre 1991, les chefs d’état et de
gouvernement des seize pays de l’Otan, réunis à Rome dans le Conseil
Atlantique-Nord, lancent “Le nouveau concept stratégique de l’Alliance”. Même
si d’une part “a disparu la monolithique, massive, et potentiellement immédiate
menace qui a été la principale préoccupation de l’Alliance dans ses quarante
premières années, -affirme le document- les risques qui perdurent pour la
sécurité de l’Alliance sont de nature multiforme et multidirectionnels. La
dimension militaire de notre Alliance reste de ce fait un facteur essentiel,
mais le fait nouveau est qu’elle sera plus que jamais au service d’un vaste
concept de sécurité”. De cette
façon l’Alliance redéfinit son rôle, fondamentalement le long des lignes
tracées par les USA.
3. L’Otan démolit la Yougoslavie
Le “nouveau concept stratégique” de l’Otan va être mis en pratique dans
les Balkans, où la crise de la Fédération Yougoslave, due aux oppositions entre
les groupes de pouvoir et aux poussées centrifuges des républiques, a atteint
le point de rupture.
En novembre 1990, le Congrès des États-Unis approuve le financement
direct de toutes les nouvelles formations “démocratiques” de la Yougoslavie,
encourageant ainsi les tendances sécessionnistes. En
décembre, le parlement de la République Croate, contrôlé par le parti de Franjo
Tudjman, émane une nouvelle Constitution sur la base de laquelle la Croatie
n’est que “patrie des Croates” et est souveraine sur son territoire. Six mois plus tard, en juin 1991, en plus de la
Croatie, la Slovénie proclame aussi sa propre indépendance. Immédiatement
après, éclatent des affrontements entre l’armée fédérale et les
indépendantistes. En octobre, en Croatie, le gouvernement Tudjman expulse plus
de 25 mille Serbes, pendant que ses milices occupent Vukovar. L’armée
fédérale répond, en reprenant la ville. La guerre civile commence à s’étendre,
mais pourrait encore être arrêtée.
La voie qui va être prise est au contraire
diamétralement opposée : l’Allemagne, engagée à étendre son influence
économique et politique dans la région des Balkans, en décembre 1991 reconnaît
unilatéralement Croatie et Slovénie comme États indépendants. En conséquence,
le jour suivant les Serbes de Croatie
proclament à leur tour l’autodétermination, en constituant la République Serbe
de la Krajina. En janvier 1992, d’abord le Vatican puis l’Europe des douze
reconnaissent aussi, outre la Croatie, la Slovénie. Alors s’enflamme aussi la
Bosnie-Herzégovine qui, à petite échelle, représente toute la gamme des problèmes ethniques et religieux
de la Fédération Yougoslave .
Les casques bleus de l’ONU, envoyés en Bosnie
comme force d’interposition entre les factions en lutte, sont volontairement
laissés en nombre insuffisant, sans moyens adaptés et sans directives précises
; ils finissent par se retrouver otages au milieu des combats. Tout concourt à
démontrer la “faillite de l’ONU” et la nécessité que ce soit l’Otan qui prenne
la situation en main. En juillet 1992 l’Otan lance la première opération de
“réponse à la crise”, pour imposer l’embargo à la Yougoslavie .
En février 1994, des avions Otan abattent
des avions serbo-bosniaques qui volent sur la Bosnie. C’est la première action
de guerre depuis la fondation de l’Alliance. Par elle l’Otan viole l’article 5
de sa propre charte constitutive, puisque l’action guerrière n’est pas motivée
par l’attaque contre un membre de l’Alliance et est effectuée en dehors de son
aire géographique .
Quand l’incendie est éteint en Bosnie (où le
feu couve sous la cendre de la division en États ethniques), l’Otan jette de
l’huile sur le foyer du Kosovo, où court depuis des années une revendication
d’indépendance de la part de la majorité albanaise. À travers des canaux
souterrains en grande partie gérés par la CIA, un fleuve d’armes et de
financements, entre la fin de 1998 et le début de 1999, va alimenter l’UCK
(Armée de libération du Kosovo), bras armé du mouvement séparatiste
kosovar-albanais. Des agents de la CIA déclareront ensuite être entrés au
Kosovo en 1998 et 1999, en habits d’observateurs de l’OSCE chargés de vérifier
le “cessez-le-feu” : ils fournissent à l’UCK des manuels étasuniens
d’entraînement militaire et des téléphones satellites, afin que les commandants
de la guérilla puissent être en contact avec l’Otan et Washington. L’UCK peut ainsi déclencher une offensive contre les
troupes fédérales et les civils serbes, avec des centaines d’attentats et
d’enlèvements.
Alors que les affrontements entre les forces yougoslaves et celles de
l’UCK provoquent des victimes des deux côtés, une puissante campagne
politico-médiatique prépare l’opinion publique internationale à l’intervention
de l’Otan, présentée comme seule façon d’arrêter l’”épuration ethnique” serbe
au Kosovo . La cible prioritaire est le président de la Yougoslavie, Slobodan
Milosevic, accusé d’”épuration ethnique”.
La guerre, appelée “Opération
Force Alliée”, commence le 24 mars 1999. Le rôle de l’Italie est déterminant :
le gouvernement D’Alema met le territoire italien, en particulier les
aéroports, à la totale disposition des forces armées des États-Unis et d’autres
pays, pour opérer ce que le président du Conseil définit comme “le droit
d’ingérence humanitaire”. Pendant 78 jours, décollant surtout des bases
italiennes, 1.100 avions effectuent 38 mille sorties, larguant 23 mille bombes
et missiles. 75% des avions et 90% des bombes et missiles sont fournis par les
États-Unis. Étasunien aussi le réseau de communication, commandement, contrôle
et renseignement à travers lesquels sont menées les opérations : “Des 2000
objectifs touchés en Serbie par les avions Otan -documente ensuite le
Pentagone- 1999 ont été choisis par le renseignement étasunien et un seul par
les Européens”.
Systématiquement, les bombardements démantèlent les structures et
infrastructures de la Serbie, provoquant des victimes surtout chez les civils.
Les dégâts qui en dérivent pour la santé et l’environnement ne sont pas
quantifiables. Rien que de la raffinerie de Pancevo vont s’échapper, à cause
des bombardements, des milliers de tonnes de substances chimiques hautement
toxiques (notamment dioxine et mercure). D’autres dégâts vont être
provoqués par l’emploi massif de la part de l’Otan, en Serbie et au Kosovo, de
projectiles à l’uranium appauvri, déjà utilisés dans la guerre du Golfe.
Aux bombardements participent aussi 54 avions
italiens, qui attaquent les objectifs indiqués par le commandement étasunien.
“Pour le nombre d’avions nous n’avons été seconds que derrière les USA.
L’Italie est un grand pays et il n’y a pas à s’étonner de l’engagement démontré
dans cette guerre”, déclare avec orgueil le président du Conseil D’Alema au
cours d’une visite faite le 10 juin 1999 à la base d’Amendola (Pouilles), en
soulignant que, pour les pilotes qui y ont participé, cela avait été “une
grande expérience humaine et professionnelle”.
Le 10 juin 1999 les troupes de la
Fédération Yougoslave commencent à se retirer du Kosovo et l’Otan met fin aux
bombardements. La résolution 1244 du Conseil de Sécurité de l’ONU indique que
la présence internationale doit avoir une “substantielle participation de
l’Otan”. “Aujourd’hui l’Otan
affronte sa nouvelle mission : celle de gouverner”, commente The Washington
Post.
La
guerre finie, plus de 60 agents du FBI sont envoyés par les USA au Kosovo, sans
trouver de traces de massacres justifiant l’accusation, faite aux Serbes, de
“nettoyage ethnique”. Slobodan Milosevic, condamné à 40 ans de réclusion par la Cour Pénale
Internationale de La Haye, meurt après cinq années de prison. Cette même Cour, en 2016, le disculpe de l’accusation
de “nettoyage ethnique”.
Le Kosovo, où les USA installent une grande base militaire (Camp
Bondsteel), devient une sorte de protectorat de l’Otan. Simultanément, sous la
couverture “Force de paix”, l’ex-UCK au pouvoir terrorise et expulse plus de
250 mille Serbes, roms, juifs et Albanais “collaborationnistes”. En 2008, avec
l’autoproclamation du Kosovo comme État indépendant, se termine la démolition
de la Fédération Yougoslave.
Alors que la guerre contre la Yougoslavie est en cours, est convoqué à
Washington, les 23-25 avril 1999, le sommet qui officialise la transformation
de l’Otan” . D’alliance qui, sur la base de l’article 5 du Traité du 4
avril 1949, engage les pays membres à assister y compris par la force armée le
pays membre qui serait attaqué dans l’aire nord-atlantique, l’Otan se trouve
transformée en alliance qui, sur la base du “nouveau concept stratégique”,
engage aussi les pays membres à “conduire des opérations de riposte aux crises
non prévues par l’article 5, en dehors du territoire de l’Alliance”. En
d’autres termes, l’Otan se prépare à projeter sa force militaire en-dehors de
ses propres frontières non seulement en Europe, mais aussi dans d’autres
régions du monde.
Ce qui ne change pas, dans la mutation de
l’Otan, c’est sa hiérarchie interne. C’est toujours le Président des États-Unis
qui nomme le Commandant Suprême Allié en Europe, qui est toujours un général
étasunien, tandis que les alliés se bornent à ratifier le choix. La même chose
se passe pour les autres commandements clé.
Le document qui engage les pays membres à
opérer en-dehors du territoire de l’Alliance, souscrit par les leaders
européens le 24 avril 1999 à Washington, confirme que l’Otan “soutient
pleinement le développement de l’identité européenne de la défense, à
l’intérieur de l’Alliance”. Le concept est clair : l’Europe Occidentale peut
avoir son “identité de la défense”, mais celle-ci doit rester à l’intérieur de
l’Alliance, à savoir sous commandement USA.
Ainsi se trouve confirmée et consolidée la
subordination de l’Union Européenne à l’Otan. Subordination prévue par le
Traité de Maastricht de 1992, qui reconnaît le droit des États UE de faire
partie de l’Otan, définie comme fondement de la défense de l’Union Européenne.
L’Italie -en participant à la guerre contre
la Yougoslavie, pays qui n’avait accompli aucune action agressive ni contre
l’Italie ni contre d’autres pays membres de l’Otan- confirme qu’elle a adopté
une nouvelle politique militaire et, simultanément, une nouvelle politique
étrangère. Celle-ci, en utilisant comme instrument la force militaire, viole le
principe constitutionnel, affirmé par l’Article 11 : “L’Italie répudie la
guerre comme instrument d’offense à la liberté des autres peuples et comme
moyen de résolution des conflits internationaux”.
4.
L’Otan s’étend à l’Est vers la Russie
En
1990, à la veille de la dissolution du Pacte de Varsovie, le Secrétaire d’état
USA James Baker assurait le Président de l’URSS Mikhail Gorbachev que “l’Otan
ne s’étendra pas d’un seul pouce à l’Est”. Mais en vingt années, après avoir
démoli la Fédération Yougoslave, l’Otan s’étend de 16 à 30 pays, en avançant
toujours plus à l’Est vers la Russie.
En 1999 elle englobe les trois premiers pays
de l’ex-Pacte de Varsovie : Pologne, République Tchèque et Hongrie. Puis, en
2004, elle s’étend à sept autres : Estonie, Lettonie, Lituanie, (auparavant
faisant partie de l’URSS) ; Bulgarie, Roumanie, Slovaquie (auparavant parties
du Pacte de Varsovie) ; Slovénie (auparavant partie de la Fédération
Yougoslave). En 2009, elle englobe l’Albanie (autrefois membre du Pacte de
Varsovie) et la Croatie (ex-partie de la Fédération Yougoslave) et, en 2017, le
Montenegro ; en 2019, elle signe le protocole d’adhésion de la Macédoine du
Nord en tant que 30ème membre. Trois autres pays -Bosnie Herzégovine (ex-partie
de la Fédération Yougoslave), Géorgie et Ukraine (ex-parties de l’URSS)- sont
candidats à l’entrée dans l’Otan.
Ce
faisant Washington lie ces pays non tant à l’Alliance que directement aux
États-Unis, en renforçant son influence à l’intérieur de l’Union Européenne.
Sur les dix pays d’Europe centre-orientale qui entrent dans l’Otan entre 1999
et 2004, sept entrent dans l’Union européenne entre 2004 et 2007 : à l’Union
européenne qui s’élargit à l’Est, les États-Unis superposent l’Otan qui
s’élargit à l’Est sur l’Europe. Ainsi se révèle clairement le dessein
stratégique de Washington : utiliser comme levier les nouveaux membres de
l’Est, pour établir dans l’Otan des rapports de force encore plus favorables
aux États-Unis, afin d’isoler la “vieille Europe” qui pourrait un jour prendre
son autonomie.
L’expansion de l’Otan à l’Est a, outre celles-ci, d’autres implications.
En englobant non seulement les pays de l’ex-Pacte de Varsovie mais aussi les
trois républiques baltes faisant autrefois partie de l’URSS, l’Otan arrive
jusqu’aux frontières de la Fédération Russe. Malgré les assurances de
Washington sur ses intentions pacifiques, cela constitue une menace, y compris
nucléaire, envers la Russie.
5. USA et Otan attaquent
l’Afghanistan et l’Irak
Les États-Unis attaquent et
envahissent l’Afghanistan, en 2001, sous le motif officiel d’y poursuivre
Oussama ben Laden, donné comme mandant de l’attaque terroriste du 11 septembre.
Une figure bien connue à Washington : ingénieur et homme d’affaires appartenant
à une riche famille saoudienne, précédemment liée par des rapports d’affaire
avec la famille Bush, Oussama ben Laden collabore activement avec la CIA quand,
de 1979 à 1989, celle-ci entraîne et arme par l’intermédiaire de l’ISI (le
service secret pakistanais) plus de 100 mille moudjahidines pour la guerre
contre les troupes soviétiques tombées dans le “piège afghan” (comme le
qualifie Zbigniew Brzezinski, en précisant que l’entraînement et l’armement des
moudjahidines avaient commencé en juillet 1979, cinq mois avant l’entrée des
troupes soviétiques en Afghanistan).
Ainsi
s’ouvre une nouvelle phase de la situation internationale : le président des
États-Unis se trouve autorisé à conduire la “guerre globale au terrorisme”, où
il n’y a pas de frontières géographiques, contre un ennemi qui peut être
identifié tour à tour non seulement en un terroriste ou présumé tel, mais en
quiconque s’oppose à la politique et aux intérêts étasuniens. L’image parfaite
d’ennemi, interchangeable et durable. Le président Bush le définit comme “un
ennemi obscur, qui se cache dans les coins sombres de la Terre”.
Le but réel de l’intervention militaire
USA/Otan en Afghanistan est l’occupation de cette aire de première importance
stratégique. L’Afghanistan est au carrefour entre Moyen-Orient, Asie Centrale,
Méridionale et Orientale. Dans cette aire (dans le Golfe et dans la Caspienne)
se trouvent de grandes réserves pétrolifères. S’y trouvent aussi trois grandes
puissances -Chine, Russie et Inde- dont la force est en train de croître et
d’influencer les linéaments mondiaux. Comme
avait prévenu le Pentagone dans son rapport du 30 septembre 2001, “la
possibilité existe qu’émerge en Asie un rival militaire avec une formidable
base de ressources”.
Dans la période précédant le 11 septembre 2001, il y a en Asie de forts
signaux d’un rapprochement entre Chine et Russie. Washington considère ce fait
comme un défi aux intérêts étasuniens, au moment critique où les États-Unis
essaient d’occuper le vide que la désagrégation de l’URSS a laissé en Asie
Centrale. Une position géostratégique clé pour le contrôle de cette aire est
celle de l’Afghanistan.
La guerre commence le 7 octobre 2001 avec le bombardement de
l’Afghanistan effectué par l’aviation étasunienne et britannique. Le
Conseil de sécurité de l’ONU autorise alors la constitution de l’ISAF (Force
internationale d’assistance à la sécurité) dont la direction est confiée par la
suite à Grande-Bretagne, Turquie, Allemagne et Pays-Bas. Mais subitement, le 11 août 2003, l’Otan annonce avoir
“pris le rôle de leadership de l’ISAF, force avec mandat ONU”. C’est un
véritable coup de main : aucune résolution du Conseil de sécurité n’autorise
l’Otan à prendre le leadership, c’est-à-dire le commandement, de l’ISAF. Ce n’est
qu’après coup, par la résolution 1659 de février 2006, que le Conseil de
sécurité “reconnaît l’engagement continu de l’Otan à diriger l’ISAF”. La
mission ISAF se trouve ainsi insérée dans la chaîne de commandement du
Pentagone. Dans cette même chaîne de commandement sont insérés les militaires
italiens assignés à l’ISAF, avec hélicoptères et avions, y compris les
chasseurs-bombardiers Tornado.
Après
l’Afghanistan c’est le tour de l’Irak, soumis depuis 1991 à un embargo
extrêmement dur qui a provoqué en dix ans un million de morts environ, dont
environ un demi-million d’enfants. Le président Bush place l’Irak, en
2002, au premier rang des pays faisant
partie de l’”axe du mal”.
Après la première guerre du Golfe en 1991, l’Irak a été soumis à un
embargo extrêmement dur qui a provoqué en dix ans un million de morts environ,
dont un demi million d’enfants. Le secrétaire d’État Colin
Powell présente au Conseil de sécurité de l’ONU une série de “preuves”
recueillies par la CIA, qui ensuite s’avèreront fausses, sur la présumée
existence d’un gros arsenal d’armes chimiques et bactériologiques possédées par
l’Irak, et sur sa présumée capacité à construire en peu de temps des armes
nucléaires. Comme le Conseil de sécurité se refuse à autoriser la guerre,
l’administration Bush va tout simplement le contourner.
La guerre commence en mars 2003 avec le
bombardement aérien de Bagdad et autres centres par l’aviation étasunienne et
britannique et par l’attaque terrestre effectuée par les marines entrés en Irak
par le Koweit. En avril des troupes USA occupent Bagdad. L’opération, appelée
“Iraqi Freedom”, est présentée comme “guerre préventive” et “exportation de la
démocratie”. Les forces d’occupation
étasuniennes et alliées -y compris italiennes engagées dans l’opération
“Antique Babylone”- rencontrent une résistance qu’ils ne s’attendaient pas à
trouver. Pour la briser, l’Irak va être mis à feu et à sang par plus d’un
million et demi de soldats, que le Pentagone déploie par rotations avec des
centaines de milliers de contractors militaires, en usant de tous les moyens :
des bombes au phosphore contre la population de Fallujah aux tortures dans la
prison d’Abu Ghraib.
L’Otan
participe de fait à la guerre avec ses propres structures et forces. En 2004 est instituée la “Mission Otan
d’entraînement”, dans le but déclaré d’”aider l’Irak à créer des forces armées
efficientes”. De 2004 à 2011 vont être entraînés, dans 2.000 cours spéciaux
tenus dans des pays de l’Alliance, des milliers de militaires et policiers
irakiens. Simultanément l’Otan envoie des instructeurs et conseillers, y
compris italiens, pour “aider l’Irak à créer son propre secteur de sécurité
sous conduite démocratique et durable” et pour “établir un partenariat à long
terme de l’Otan avec l’Irak”.
6.
L’Otan démolit l’État libyen
De
multiples facteurs rendent la Libye importante aux yeux des États-Unis et des
puissances européennes. Elle possède les plus grandes réserves pétrolifères
d’Afrique, précieuses par leur haute qualité et le bas coût d’extraction- et de
grosses réserves de gaz naturel. L’État
libyen conserve sur elles un fort contrôlée, en laissant aux compagnies
étasuniennes et européennes des marges de profit limitées. En plus de l’or
noir, la Libye possède l’or blanc : l’immense réserve d’eau fossile de la nappe
nubienne qui s’étend sous Libye, Egypte, Soudan et Tchad. Énormes
aussi les fonds souverains, les capitaux que l’État libyen a investi à
l’étranger, notamment pour doter l’Afrique de ses propres organismes financiers
et de sa propre monnaie.
À la veille de la guerre de 2011, les
États-Unis et les puissances européennes “gèlent”, c’est-à-dire séquestrent,
les fonds souverains libyens, assénant un coup mortel à l’ensemble du projet. Les
emails de Hillary Clinton (secrétaire d’état de l’administration Obama en
2011), découverts ensuite, confirment ce qu’était le véritable but de la guerre
: bloquer le plan de Kadhafi d’utiliser les fonds souverains libyens pour créer
des organismes financiers autonomes dans l’Union africaine et une monnaie
africaine alternative au dollar et au franc CFA (la monnaie que sont obligés
d’employer 14 pays africains, ex-colonies françaises). C’est H. Clinton -documentera ensuite le New York
Times- qui fait signer au président Obama “un document qui autorise une
opération secrète en Libye et la fourniture d’armes aux rebelles”.
On va financer et armer les secteurs tribaux hostiles au gouvernement de
Tripoli et des groupes islamistes qui, quelques mois auparavant, étaient encore
définis comme terroristes. En même temps sont infiltrées en Libye des forces
spéciales, dont des milliers de commandos qataris facilement camouflables.
Toute l’opération est dirigée par les États-Unis, d’abord via le Commandement
Africa, puis par l’intermédiaire de l’Otan sous commandement USA .
Le
19 mars 2011 commence le bombardement aéronaval de la Libye . En sept mois, l’aviation USA/Otan effectue 30 mille
missions, dont 10 mille d’attaque, avec utilisation de plus de 40 mille bombes
et missiles. À cette guerre participe l’Italie avec ses bases et forces
militaires, en foulant aux pieds le Traité d’amitié, partenariat et coopération
entre les deux pays.
Pour la guerre contre la Libye l’Italie met à disposition des forces
USA/Otan 7 bases aériennes (Trapani, Gioia del Colle, Sigonella, Decimomannu,
Aviano, Amendola et Pantelleria), en assurant assistance technique et
approvisionnements. L’Aéronautique italienne participe à la guerre en
effectuant plus de 1 000 missions, et la mMarine militaire italienne va être
engagée sur plusieurs fronts.
Avec
la guerre USA/Otan de 2011, l’État libyen est démoli et Kadhafi assassiné. On a
démoli cet État qui, sur la rive sud de la Méditerranée face à l’Italie,
gardait “des niveaux élevés de croissance économique” (comme documentait en
2010 la Banque mondiale elle-même), enregistrant “des indicateurs élevés de
développement humain” parmi lesquels l’accès universel à l’instruction primaire
et secondaire et, pour 46%, à celle de niveau universitaire. Malgré les
disparités, le niveau de vie de la population libyenne était largement plus
haut que celui des autres pays africains. Pour preuve, plus de deux millions d’immigrés, le plus
souvent africains, trouvaient du travail en Libye.
Sont aussi être frappés par la guerre les immigrés de l’Afrique
sub-saharienne qui, persécutés sous l’accusation d’avoir collaboré avec
Kadhafi, sont emprisonnés ou obligés de fuir. Beaucoup, poussés par le
désespoir, tentent la traversée de la Méditerranée vers l’Europe. Ceux qui y
perdent la vie sont eux aussi victimes de la guerre par laquelle l’Otan a
démoli l’État libyen.
7.
La guerre USA/Otan pour démolir la Syrie
Après
avoir démoli l’État libyen commence, dans cette même année 2011, l’opération
USA/Otan pour démolir l’État syrien . Une
des raisons est le fait que Syrie, Iran et Irak signent en juillet 2011 un
accord pour un gazoduc qui devrait relier le gisement iranien de South Pars, le
plus grand du monde, à la Syrie et donc à la Méditerranée. La Syrie, où a été
découvert un autre gros gisement près de Homs, pourrait devenir de cette façon
un hub de couloirs énergétiques alternatifs à ceux qui traversent la Turquie et
à d’autres parcours, contrôlés par les compagnies étasuniennes et européennes.
La
guerre secrète commence avec une série d’attentats terroristes, effectués
surtout à Damas et Alep. Les images des édifices dévastés par de très puissants
explosifs sont éloquentes : il ne s’agit pas de l’oeuvre de simples rebelles,
mais de professionnels de la guerre infiltrés. Des centaines de spécialistes
des forces d’élite britanniques Sas et Sbs -rapporte le Daily Star- opèrent en
Syrie, à côté d’unités étasuniennes et françaises.
La
force de choc est constituée d’un ramassis armé de groupes islamistes (jusque
peu de temps auparavant classés par Washington comme terroristes) provenant
d’Afghanistan, Bosnie, Tchétchénie, Libye et autres pays. Dans le groupe d’Abu
Omar al-Chechen -d’après l’envoyé du Guardian à Alep- les ordres sont donnés en
arabe, mais doivent être traduits en tchétchène, tadjik, turc, dialecte
saoudien, urdu, français et autres langues. Munis de faux passeports
(spécialité CIA), les combattants affluent dans les provinces turques de Adana
et Hatay, à la frontière de la Syrie, où la CIA a ouvert des centres de
formation militaire. Les
armes arrivent surtout via l’Arabie Saoudite et le Qatar qui, comme en Libye,
fournit aussi des forces spéciales.
Le commandement des opérations se trouve à bord des navires Otan dans le
port d’Iskenderun. À Istanbul est ouvert un centre de propagande où des
dissidents syriens, formés et financés par le Département d’état étasunien,
confectionnent les nouvelles et les vidéos qui sont diffusées par des réseaux
satellites.
Depuis
des centres opérationnels spécifiques, des agents de la CIA pourvoient à
l’achat des armes avec de gros financements concédés par l’Arabie Saoudite, le
Qatar et autres monarchies du Golfe. Ils organisent le transport des armes en
Turquie et Jordanie à travers un pont aérien et les font parvenir, à travers la
frontière, aux groupes en Syrie, déjà entraînés dans des camps spéciaux
installés en territoire turc et jordanien.
La stratégie de ces opérations émerge de
documents découverts par la suite. La
secrétaire d’état Hillary Clinton, dans un email de 2012 (déclassifié comme
“case number F-2014-20439, Doc No. C05794498”), écrit que, étant donnée la
“relation stratégique” Iran-Syrie, “le renversement d’Assad constituerait un
immense bénéfice pour Israël, et ferait aussi diminuer la compréhensible
crainte israélienne de perdre le monopole nucléaire”.
Un document officiel du Pentagone , daté du 12 août 2012 (déclassifié le
18 mai 2015 à l’initiative du groupe Judicial Watch), affirme que “les pays
occidentaux, les États du Golfe et la Turquie soutiennent en Syrie les forces
d’opposition qui tentent de contrôler les aires orientales, adjacentes aux
provinces irakiennes occidentales”, en les aidant à “créer des refuges sûrs
sous protection internationale”. Il y a “la possibilité d’établir un émirat
salafite en Syrie orientale, et ceci est exactement ce que veulent les
puissances qui soutiennent l’opposition, pour isoler le régime syrien, arrière
stratégique de l’expansion chiite (Irak et Iran)”.
C’est
dans ce contexte qu’en 2013 se forme l’ISIS (ou DAESH), l’ “État islamique de
l’Irak et de la Syrie”, qui s’auto-proclame “État du califat islamique”. En mai
2013, un mois après avoir fondé l’ISIS, Ibrahim al-Badri -le “calife” connu
sous le nom de guerre d’Abu Bakr al-Bagdhadi- rencontre en Syrie le sénateur
étasunien John McCain, chef de file des républicains chargé par le démocrate
Obama de mener des opérations secrètes pour le compte du gouvernement. La rencontre
est documentée photographiquement.
DAESH reçoit des financements, armes et
voies de transit des plus proches alliés des États-Unis : Arabie Saoudite,
Qatar, Koweit, Turquie et Jordanie, sur la base d’un plan certainement
coordonné par la CIA. Après avoir conquis avec ses milices une grande partie du
territoire syrien, DAESH lance l’offensive en Irak, non fortuitement au moment
où le gouvernement présidé par le chiite Nouri al-Maliki prend ses distances de
Washington, en se rapprochant de plus en plus de la Chine et de la Russie.
L’offensive, qui embrase l’Irak, trouve un matériau inflammable dans la
rivalité chiites-sunnites. Les milices de DAESH occupent Ramadi, la deuxième
ville d’Irak, et immédiatement après Palmyre en Syrie centrale, en tuant des milliers
de civils et contraignant d’autres dizaines de milliers à la fuite.
DAESH joue de fait un rôle servant la
stratégie USA/Otan de démolition des États. Ceci ne signifie pas que la masse
de ses miliciens, provenant de divers pays, en soit consciente. Elle est très
composite : en font partie aussi bien des combattants islamistes, qui se sont
formés dans le drame de la guerre, que des ex-militaires de l’époque de Saddam
Hussein qui ont combattu contre les envahisseurs, que de nombreux autres dont les
histoires sont toujours reliées aux situations sociales tragiques provoquées
par la première guerre du Golfe et par les suivantes sur un cycle de plus de
vingt ans. En font partie aussi
divers foreign fighters provenant d’Europe et des États-Unis, dont les masques
cachent certainement des agents secrets formés spécialement pour de telles
opérations.
Très suspect aussi est l’accès illimité que DAESH a, au plus fort de son
développement, dans les réseaux médiatiques mondiaux, dominés par les colosses
étasuniens et européens, à travers lesquels il diffuse les films des
décapitations qui, en suscitant l’horreur, créent une vaste opinion publique
favorable à l’intervention en Irak et Syrie.
La campagne militaire “Inherent Resolve”, formellement dirigée contre
l’État islamique, est lancée en Irak et Syrie en août 2014 par les USA et leurs
alliés : France, Grande-Bretagne, Canada, Australie, Arabie Saoudite, Émirats
Arabes Unis, Bahrein et autres. Si États-Unis, France et Grande-Bretagne
utilisaient leurs chasseurs-bombardiers comme ils l’avaient fait contre la
Libye en 2011, les forces de DAESH, se déplaçant dans des espaces ouverts,
auraient été une cible facile. Celles-ci peuvent au contraire avancer
imperturbablement avec des colonnes de blindés chargées d’hommes et
d’explosifs. Si DAESH avance en Syrie et en Irak, c’est parce qu’à Washington
c’est justement cela qu’on veut. L’objectif stratégique de Washington est la
démolition de la Syrie et la ré-occupation de l’Irak.
L’intervention militaire russe en Syrie en 2015, en soutien des forces
gouvernementales, renverse le destin du conflit. Les chasseurs-bombardiers
russes détruisent l’une après l’autre les forteresses de Daesh, ouvrant la voie
aux forces de Damas. Les États-Unis, décontenancés, jouent la carte de la
fragmentation de la Syrie, en soutenant les indépendantistes kurdes et
d’autres.
Pendant cinq ans on a essayé de démolir
l’État syrien, en le minant de l’intérieur avec des groupes terroristes armés
et infiltrés de l’extérieur et en provoquant plus de 250 mille morts. Au moment où l’opération est en train d’échouer du
fait de l’intervention militaire russe les appareils politico-médiatiques de
tout l’Occident renforcent leur colossale psy-op (opération psychologique)
faisant apparaître comme agresseurs le gouvernement et tous les Syriens qui
résistent à l’agression. Le fer de lance de la psy-op est la diabolisation,
commencée en 2011, du président Assad (comme il avait déjà été fait avec
Milosevic et Kadhafi), présenté comme un dictateur sadique qui se délecte à
bombarder des hôpitaux et à exterminer des enfants, avec l’aide de son ami
Poutine (dépeint comme néo-tsar de l’empire russe ressuscité). Au moment où
tombent les dernières forteresses de Daesh, ces mêmes appareils
politico-médiatiques diffusent la fake news que DAESH a été battu par les
États-Unis et par les “Forces démocratiques syriennes” (une milice de kurdes et
d’arabes armée et soutenue par le Pentagone).
8. Israël et émirs dans l’Otan
Israël se trouve ainsi intégré encore plus dans l’Otan, à laquelle il
est déjà étroitement lié à travers le « Programme de coopération individuelle
», qui avait été ratifié par l’Otan le 2 décembre 2008, trois semaines avant
l’opération israélienne « Plomb durci » à Gaza. Il comprend notamment la
collaboration entre les services de renseignement et la connexion des forces
israéliennes, y compris nucléaires, au système électronique Otan.
Israël -l’unique puissance nucléaire au Moyen-Orient, non adhérent au
Traité de non-prolifération, souscrit par contre par l’Iran qui n’a pas d’armes
nucléaires- possède (bien que sans l’admettre) un arsenal estimé à 100-400
armes nucléaires, dont des mini-nukes et bombes à neutrons de nouvelle
génération ; il produit du plutonium et du tritium en quantité suffisante pour
en construire des centaines d’autres. Les têtes nucléaires israéliennes sont
prêtes au lancement sur des missiles balistiques et sur des
chasseurs-bombardiers fournis par les USA, auxquels s’ajoutent maintenant les
F-35.
Les principaux pays européens de l’Otan, qui
formellement soutiennent l’accord sur le
nucléaire iranien stipulé en 2015 (dont les USA sont sortis en 2018), sont en
réalité aux côtés d’Israël. L’Allemagne lui a fourni six sous-marins Dolphin,
modifiés pour pouvoir lancer des missiles de croisière à tête nucléaire.
Allemagne, France, Italie, Grèce et Pologne ont participé, avec les USA, au
plus grand exercice international de guerre aérienne de l’histoire d’Israël, le
Blue Flag 2017. L’Italie, liée à Israël par un accord de
coopération militaire (Loi n° 94, 2005), y a participé avec des chasseurs
Tornado du 6° Stormo de Ghedi (Brescia), affecté au transport des bombes
nucléaires étasuniennes.
Selon le plan testé dans l’exercice
USA-Israël Juniper Cobra 2018, des forces étasuniennes et Otan arriveraient
d’Europe (surtout des bases en Italie) pour soutenir Israël dans une guerre
contre l’Iran. Celle-ci pourrait commencer par une attaque israélienne contre
les sites nucléaires iraniens, comme celle effectuée en 1981 à Osiraq en Irak. En cas de représailles iraniennes, Israël pourrait
employer une arme nucléaire mettant en mouvement une réaction en chaîne aux
issues imprévisibles.
À côté de la Mission officielle israélienne auprès de l’Otan se trouvent
celles du royaume de Jordanie et des émirats du Qatar et du Koweit, «
partenaires très actifs » qui sont intégrés encore plus dans l’Otan pour
mérites acquis. La Jordanie héberge des bases secrètes de la CIA dans
lesquelles —documentent le New York Times et Der Spiegel — ont été entraînés
des militants islamistes d’Al-Qaeda et de Isis (Daesh) pour la guerre secrète
en Syrie et en Irak. Le Qatar a participé à la guerre Otan contre la Libye, en
infiltrant en 2011 environ 5 000 commandos sur son territoire (comme l’a
déclaré au Guardian le chef d’état-major qatari même), et à celle contre la
Syrie : c’est ce qu’admet dans une interview au Financial Times l’ex-Premier
ministre qatari, Hamad bin Jassim Al Thani, qui parle d’opérations qataris et
saoudiennes d’«interférences» en Syrie, coordonnées par les États-Unis.
Le Koweit, à travers l’ « Accord sur le transit », permet à l’Otan de
créer sa première escale aéroportuaire dans le Golfe, non seulement pour
l’envoi de forces et de matériels militaires en Afghanistan, mais aussi pour la
« coopération pratique de l’Otan avec le Koweit et d’autres partenaires, comme
l’Arabie Saoudite ». Partenaires soutenus par les USA dans la guerre
qui massacre des civils au Yémen. Y participe aussi avec une quinzaine de
chasseurs-bombardiers le Koweit à qui l’Italie fournit 28 chasseurs Eurofighter
Typhoon de nouvelle génération, après avoir fourni à Israël 30 chasseurs M-346
d’entraînement avancé. Les Eurofighter Typhoon, que le Koweït utilise pour
perpétrer des massacres au Yémen et ailleurs, peuvent être armés aussi de
bombes nucléaires. L’entraînement des
équipages est assuré par l’Aéronautique italienne.
9. La gestion USA/Otan dans le coup
d’état en Ukraine
L’opération menée par USA et
Otan en Ukraine commence quand en 1991,
après le Pacte de Varsovie, se désagrège aussi l’Union Soviétique qui en
faisait partie. Les États-Unis et les alliés européens s’emploient
immédiatement à tirer le plus grand avantage de la nouvelle situation
géopolitique.
L’Ukraine -dont le territoire sert de tampon entre Otan et Russie et est
traversé par les couloirs énergétiques entre Russie et UE- n’entre pas
directement dans l’Otan. Mais elle va faire partie, dans le cadre de l’Otan,
du “Partenariat pour la paix”
contribuant aux opérations de “maintien de la paix” dans les Balkans.
En 2002 est adopté le “Plan d’action Otan-Ukraine” et le président
Kuchma annonce son intention d’adhérer à l’Otan. En 2005, dans le sillage de la
“révolution orange” (orchestrée et financée par les USA et par les puissances
européennes), le président Yushchenko est invité au Sommet Otan à Bruxelles.
Immédiatement après est lancé un “dialogue intensifié sur l’aspiration de
l’Ukraine à devenir membre de l’Otan” et en 2008 le Sommet de Bucarest donne le
feu vert à son entrée.
Dans cette même année l’armée géorgienne, entraînée et armée par les
États-Unis et en même temps par Israël à travers des compagnies militaires
“privées”, attaque l’Ossétie du Sud en lutte depuis 1991 (quand l’URSS se
désagrège) pour se rendre indépendante de la Géorgie. Dans la
nuit du 8 août 2008 la Géorgie, épaulée par l’Otan, lance une offensive
militaire pour reconquérir le contrôle de la région disputée. Quelques heures
plus tard la Russie intervient militairement, repoussant l’invasion géorgienne,
et l’Ossétie du Sud se rend totalement indépendante de la Géorgie. C’est le
premier signal de l’offensive que l’Otan, sous commandement USA, est en train
de préparer sur le front oriental pour obliger la Russie à réagir.
En
Ukraine, en 2009, Kiev signe un accord qui permet le transit par son propre
territoire d’approvisionnements pour les forces Otan en Afghanistan. Désormais
l’adhésion à l’Otan semble sûre mais, en 2010, le président nouvellement élu
Yanoukovitch annonce que, bien que continuant la coopération, l’adhésion à
l’Otan n’est pas au programme de son gouvernement. Mais
entretemps, depuis 1991, l’Otan a tissé un réseau de liens à l’intérieur des
forces armées ukrainiennes. Des officiers supérieurs participent pendant des
années à des cours du NATO Defense College à Rome et à Oberammergau
(Allemagne). Dans ce même cadre s’insère l’institution, auprès de l’Académie
militaire ukrainienne, d’une nouvelle “faculté multinationale” avec des
enseignants Otan. Est aussi
notablement développée la coopération technico-scientifique dans le domaine des
armements pour faciliter la participation des forces armées ukrainiennes à des
“opérations conjointes pour la paix” sous direction Otan.
Comme
n’existe pas que ce qui se voit, il est évident que l’Otan construit un réseau
de liaisons dans les milieux militaires et civils beaucoup plus étendu que
celui qui apparaît. À travers la CIA et d’autres services secrets sont
recrutés, financés, entraînés et armés des militants néonazis. Une
documentation photographique montre de jeunes militants néonazis ukrainiens de
UNO-UNSO entraînés en 2006 en Estonie par des instructeurs Otan, qui leur
apprennent des techniques de combat urbain et l’utilisation d’explosifs pour
des sabotages et attentats.
C’est le même mode opératoire que celui
utilisé par l’Otan, pendant la guerre froide, pour former la structure
paramilitaire secrète “Gladio”. Active
aussi en Italie où, à Camp Darby (Pise) et dans d’autres bases, sont
entraînés des groupes néo-fascistes en les préparant à des attentats et à un
éventuel coup d’état.
La
structure paramilitaire des groupes néonazis ukrainiens entre en action en
2014, Place Maïdan à Kiev. Une manifestation antigouvernementale, avec
des revendications justes contre la corruption galopante et la dégradation des
conditions de vie, va se trouver rapidement transformée en véritable champ de
bataille : alors que des groupes armés donnent l’assaut contre les édifices du
gouvernement, des tireurs embusqués “inconnus” (qu’on a fait venir pour cela de
Georgie à Kiev) tirent avec les mêmes fusils de précision à la fois contre les
manifestants et les policiers.
Le 20 février 2014 le secrétaire général de
l’Otan s’adresse, sur un ton de commandement, aux forces armées ukrainiennes,
en les avertissant de “rester neutres”, sous peine de “graves conséquences
négatives pour nos relations”. Abandonné par les hautes hiérarchies des forces
armées et par une grande partie de l’appareil gouvernemental, le président
Viktor Yanoukovitch est obligé de s’enfuir.
Andriy Parubiy -co-fondateur du parti
national-social, constitué en 1991 sur le modèle du Parti national-socialiste
d’Adolf Hitler, et chef des formations paramilitaires néonazies- est mis à la
tête du “Conseil de défense et sécurité national”.
Le putsch de Place Maïdan est accompagné
d’une campagne persécutrice, dirigée notamment contre le Parti communiste et
les syndicats, analogue à celles qui marquèrent l’avénement du fascisme en
Italie et du nazisme en Allemagne. Sièges de parti détruits, dirigeants locaux
lynchés, journalistes torturés et assassinés ; militants brûlés vifs dans la
Maison des Syndicats d’Odessa ; habitants désarmés de l’Ukraine orientale
d’origine russe massacrés à Mariupol, bombardés au phosphore blanc à Slaviansk,
Lougansk et Donetsk.
C’est
un véritable coup d’état sous gestion USA/Otan, dans le but stratégique de
provoquer en Europe une nouvelle guerre froide pour frapper et isoler la Russie
et renforcer en même temps l’influence et la présence militaire des États-Unis
en Europe. Devant le coup d’état et l’offensive contre les Russes
d’Ukraine, le Conseil suprême de la République autonome de Crimée -territoire
russe passé à l’Ukraine en période soviétique en 1954- vote la sécession vis à
vis de Kiev et la demande de ré-annexion à la Fédération de Russie, décision
qui est confirmée avec 97% de voix favorables par un référendum populaire. Le
18 mars 2014 le président Poutine signe le traité d’adhésion de la Crimée à la
Fédération de Russie avec le statut de république autonome. La Russie va alors
être accusée par l’Otan et par l’UE d’avoir annexé illégalement la Crimée et va
être soumise à des sanctions. Elle répond par des contre-sanctions qui frappent
surtout les économies de l’UE, italienne comprise.
Pendant que dans le Donbass les
auto-proclamées Républiques Populaires de Donetsk et Lougansk soutenues par la
Russie résistent à l’offensive de Kiev, qui provoque des milliers de morts chez
les civils, la feuille de route pour la coopération technico-militaire
Otan-Ukraine, signée en décembre 2015, intègre de fait les forces armées et
l’industrie guerrière de Kiev dans celles de l’Alliance sous direction USA.
En
2019 l’Ukraine accomplit un acte sans précédents : elle inclut dans sa
Constitution l’engagement à entrer officiellement dans l’Otan et simultanément
dans l’Union Européenne. Le 7 février, sur proposition du président Petro
Poroshenko -l’oligarque qui s’est enrichi par le saccage des propriétés
publiques, et qui est à nouveau candidat à la présidence- le parlement de Kiev
approuve (par 334 voix contre 35 et 16 absents) les amendements en ce sens de
la Constitution. Le Préambule énonce “le cours irréversible de l’Ukraine vers
l’intégration euro-atlantique” ; les Articles 85 et 116 décrètent qu’un devoir
fondamental du parlement et du gouvernement est d’”obtenir la pleine
appartenance de l’Ukraine à l’Otan et à l’UE” ; l’Article 102 stipule que “le
président de l’Ukraine est le garant du cours stratégique de l’État pour
obtenir la pleine appartenance à l’Otan et à l’UE”.
L’inclusion dans la Constitution ukrainienne de
l’engagement à entrer officiellement dans l’Otan comporte des conséquences très
graves.
Sur le plan intérieur, il aliène à ce choix l’avenir de l’Ukraine, en
excluant toute alternative, et met de fait hors la loi tout parti ou personne
qui s’y oppose.
Sur le plan international, il faut garder à l’esprit que l’Ukraine est
déjà de fait dans l’Otan, dont elle est un pays partenaire : par exemple le
Bataillon Azov, dont l’empreinte nazie est représentée par l’emblème calqué sur
celui des SS Das Reich, a été transformé en régiment d’opérations spéciales,
doté de véhicules blindés et entraînés par des instructeurs USA de la 173ème
Division aéroportée, transférés en Ukraine de Vicence, secondés par d’autres appartenant
à l’Otan.
Comme la Russie est accusée par l’Otan d’avoir annexé illégalement la
Crimée et de mener des actions militaires contre l’Ukraine, si celle-ci entrait
officiellement dans l’Otan, les 30 autres membres de l’Alliance, sur la base de
l’Article 5, devraient “assister la partie attaquée en entreprenant l’action
jugée nécessaire, y compris l'emploi de la force armée”. Autrement dit, ils
devraient partir en guerre contre la Russie.
Sur ces dangereuses implications de la modification de la Constitution
ukrainienne -derrière laquelle se tiennent certainement les stratèges USA/Otan-
tombe en Europe le silence politique et médiatique.
10. L’escalade USA/Otan en Europe
En trois mois seulement l’Otan quadruple ses chasseur-bombardiers, à
double capacité conventionnelle et nucléaire, déployés dans la région baltique
(autrefois partie de l’URSS) ; elle envoie des avions radar AWACS sur l’Europe
orientale et augmente le nombre de navires de guerre en Mer Baltique, Mer Noire
et Méditerranée ; elle déploie en Pologne, Estonie, Lettonie et Lituanie des
forces terrestres étasuniennes, britanniques et allemandes ; elle intensifie
les exercices conjoints en Pologne et dans les pays baltes, en les augmentant
au cours de l’année à plus de 200.
Depuis 2014 la pression USA/Otan sur la Russie augmente en progression
géométrique. En quatre années, de 2014 à 2018, les États-Unis dépensent 10
milliards de dollars pour l’ “Initiative de réassurance de l’Europe” (ERI),
dont le but officiel est d’”accroître notre capacité à défendre l’Europe contre
l’agression russe”. Presque la moitié de la dépense sert à faire
monter en puissance le “prépositionnement stratégique” USA en Europe,
c’est-à-dire les dépôts d’armements qui, situés en position avancée, permettent
“le rapide déploiement de forces dans le théâtre de guerre”. Un autre gros
pourcentage est destiné à “augmenter la présence sur la base de rotations de
forces étasuniennes dans toute l’Europe”. Les pourcentages restants servent au
développement des infrastructures des bases en Europe pour “augmenter la
disponibilité des actions USA”, à la montée en puissance des exercices
militaires et de l’entraînement pour “augmenter la disponibilité et
interopérabilité des forces Otan”.
Les fonds de l’ERI -spécifie le Commandement
Européen des États-Unis- ne sont qu’une partie de ceux destinés à l’”Opération
Atlantic Resolve, qui démontre la capacité USA à répondre aux menaces contre
les alliés”. Dans le cadre de cette opération, est transférée en Pologne depuis
les USA, en janvier 2017, la 3ème Brigade blindée, composée de 3.500 soldats,
87 chars d’assaut, 18 obusiers autopropulsés et autres véhicules. Elle est
ensuite remplacée par une autre unité, pour que les forces blindées
étasuniennes soient en permanence déployées sur le territoire polonais. De là,
leurs détachements sont transférés, pour entraînement et exercices, dans d’autres
pays de l’Est, surtout Estonie, Lituanie, Lettonie, Bulgarie, Roumanie et même
Ukraine, c’est-à-dire qu’ils sont continuellement déployés au bord de la
Russie.
Toujours dans le cadre de cette opération,
est transférée dans la base de Illesheim (Allemagne) la 10ème Brigade aérienne
de combat, avec une centaine d’hélicoptères de guerre. Ses task force sont envoyées “en positions avancées”
en Pologne, Roumanie et Lettonie. Dans les bases d’Ämari (Estonie) et Graf
Ignatievo (Bulgarie), sont déployés des chasseur-bombardiers USA et Otan,
Eurofighter italiens compris, pour la “surveillance aérienne” de la Baltique.
L’opération prévoit en outre “une présence persistante en Mer Noire”, avec la
base aérienne de Kogalniceanu (Roumanie) et celle d’entraînement de Novo Selo
(Bulgarie).
Le général Curtis Scaparrotti, chef du Commandement Européen des
États-Unis et en même temps Commandant Suprême Allié en Europe, assure que “nos
forces sont prêtes et positionnées pour faire obstacle à l’agression russe”. Un
contingent USA se trouve positionné en Pologne orientale, dans le “Suwalki
Gap”, bande de terrain plat longue d’une centaine de kilomètres qui, d’après
l’Otan, “serait un passage parfait pour les chars russes”. Ainsi se
trouve exhumé l’attirail propagandiste de la vieille guerre froide : celui des chars russes prêts à envahir
l’Europe. Alors qu’est agité le spectre d’une menace insistante de l’Est, ce
sont au contraire les chars étasuniens qui arrivent en Europe.
Le
plan est clair. Après avoir provoqué avec le putsch de Place Maïdan une
nouvelle confrontation avec la Russie, Washington (malgré le changement
d’administration du président Obama au président Trump) poursuit la même
stratégie : transformer l’Europe en première ligne d’une nouvelle guerre froide,
à l’avantage des intérêts des États-Unis et de leurs rapports de force avec les
plus grandes puissance européennes.
Les
puissances européennes de l’Otan participent au déploiement sur le flanc
oriental -comprenant forces blindées, chasseurs-bombardiers, navires de guerre
et unités de missiles y compris nucléaires- comme le montre l’envoi de troupes
françaises et de blindés britanniques en Estonie. On parle, en cette période,
d’”armée européenne”, mais dans la rencontre avec les ministres de la défense
de l’UE, en avril 2017 à Malte, le secrétaire général de l’Otan Stoltenberg
clarifie en ces termes : “Il a été clairement convenu de la part de l’Union
Européenne que son but n’est pas de constituer une nouvelle armée européenne ou
des structures de commandement en compétition avec celles de l’Otan, mais
quelque chose qui soit complémentaire à ce que fait l’Otan”.
11.
Le porte-avions Italie sur le front de guerre
Les Forces armées étasuniennes
possèdent en Italie (selon le rapport officiel du Pentagone Base Structure
Report ) plus de 1.500 édifices, avec une superficie totale de plus d’1 million
de mètres carrés, et ont en location ou concession 800 autres édifices pour une
superficie d’environ 900 mille m2. Il s’agit, en tout, d’environ 2 millions de
mètres carrés, distribués sur une cinquantaine de sites. Mais ce n’est là
qu’une partie de la présence militaire étasunienne en Italie.
Aux bases militaires USA s’ajoutent celles de l’Otan sous commandement
USA et les bases italiennes à disposition des forces USA/Otan. On estime qu’au
total elles sont plus de cent. Le réseau complet de bases militaires en Italie
est, directement ou indirectement, sous les ordres du Pentagone. Il entre dans
l’”aire de responsabilité” du United States European Command (EUCOM), le
Commandement Européen des États-Unis, avec à sa tête un général étasunien qui
recouvre en même temps la charge de Commandant Suprême Allié en Europe. L’”aire
de responsabilité” de l’EUCOM, un des six “commandements combattants unifiés”
avec lesquels les USA recouvrent tout le globe, comprend la totalité de la
région européenne et toute la Russie (y compris sa partie asiatique), plus
certains pays de l’Asie Occidentale et Centrale : Turquie, Israël, Géorgie,
Arménie et Azerbaijan.
Dans la base aérienne d’Aviano (Pordenone) est déployée la 31st Fighter
Wing, l’escadrille étasunienne prête à l’attaque avec environ 50 bombes
nucléaires B61 (nombre estimé par la FAS, la Fédération des Scientifiques
Américains, pour la période antécédente à 2020).
Dans
la base aérienne de Ghedi (Brescia) est déployé le 6° Stormo de l’Aéronautique
italienne, prêt à l’attaque sous commandement USA avec environ 20 bombes
nucléaires B61 (estimation de la FAS pour la période antécédente à 2020). Que
des pilotes italiens soient entraînés à l’attaque nucléaire -écrit la FAS- est
démontré par la présence à Ghedi d’une des quatre unités de l’U.S. Air Force
déployées dans les bases européennes (outre l’Italie, en Allemagne, Pays-Bas et
Belgique) “où les armes nucléaires USA sont destinées au lancement par des
avions du pays hôte”. Les pilotes des quatre pays européens plus les Turcs sont
entraînés à l’utilisation des bombes nucléaires dans l’exercice annuel Otan de
guerre nucléaire. En 2013 il s’est déroulé à Aviano, en 2014 à Ghedi.
Aux armes nucléaires USA stockées sur le
territoire italien, dont le nombre effectif est secret, s’ajoutent celles qui
sont à bord d’unités de la Sixième Flotte dont la base principale est à Gaeta
dans le Latium. La Sixième Flotte dépend du Commandement des Forces Navales USA
en Europe, dont le quartier général est à Naples-Capodichino.
À Vicenza est basée la 173ème Brigade
Aéroportée de l’Armée USA, qui fournit des forces d’intervention rapide au
Commandement Européen, au Commandement Afrique et au Commandement Central (dont
l’”aire de responsabilité” comprend Moyen-Orient et Asie Centrale, plus
l’Égypte). Des forces de la 173ème Brigade, qui ont été employées en Irak en
2003, sont envoyées par rotation en Afghanistan, en Ukraine et autres pays de
l’Europe Orientale.
Dans l’aire Pise/Livourne se trouve Camp
Darby, le plus grand arsenal USA du monde en-dehors de la mère-patrie. C’est la
base logistique de l’Armée USA qui approvisionne les forces terrestres et
aériennes étasuniennes et alliées en Europe, Moyen-Orient et Afrique. Dans ses
125 bunkers sont stockés des projectiles d’artillerie, des bombes aéroportées
et missiles dans un nombre qui peut être estimé à plus de 1,5 millions. On ne
peut pas exclure que, parmi les armes aériennes stockées à Camp Darby, il y ait
eu et puisse y avoir des bombes nucléaires. Avec les munitions pour artillerie
sont stockés dans la base des chars d’assaut et autres véhicules militaires
pour un nombre estimé à plus de 2.500, à côté de plus de 11.000 matériels militaires
de divers types. Dans la base se trouve l’équipement complet de deux bataillons
blindés et deux d’infanterie mécanisée, qui peut être rapidement envoyé en zone
d’opérations à travers l’aéroport de Pise (Hub aérien militaire national) et le
port de Livourne (où peuvent accoster aussi des unités à propulsion nucléaire).
Ici font escale mensuellement d’énormes navires de compagnies privées qui
transportent des armes pour le compte du Pentagone, en reliant les ports
étasuniens à ceux de la Méditerranée, du Moyen-Orient et de l’Asie.
Dans une aire de Camp Darby d’abord destinée
à des activités de détente, formellement restituée à l’Italie, a été transféré
en 2019 de la Caserne Gamerra de Pise le Commandement des forces spéciales de
l’armée italienne (COMFOSE), qui réunit sous un commandement unifié quatre
régiments. Cela permet d’intégrer complètement les forces spéciales italiennes
avec les étasuniennes, en les utilisant dans des opérations secrètes sous
commandement USA. Le tout sous la chape du secret militaire. Difficile alors de
ne pas penser à l’histoire des opérations secrètes de Camp Darby : où il est
ressorti des enquêtes des juges Casson et Mastelloni que Camp Darby a joué
depuis les années Soixante la fonction de base du réseau putschiste constitué
par la CIA et par le Sifar dans le cadre du plan secret Gladio.
Les bases USA/Otan -écrivait Ferdinando
Imposimato, président honoraire de la Cour Suprême de Cassation- ont fourni les
explosifs pour les massacres de Piazza Fontana, Capaci et Via d’Amelio. Dans
ces bases “se réunissaient des terroristes d’extrême-droite, des officiers de
l’Otan, des mafieux, des hommes politiques italiens et des franc-maçons, à la
veille des attentats”.
Camp Darby a aussi à voir avec la tragédie
de la navette maritime Moby Prince, entrée en collision dans la rade du port de
Livourne avec le pétrolier Agip Abruzzo le soir du 10 avril 1991. 140 personnes meurent dans le navire en flammes, après
avoir attendu les secours en vain pendant des heures. Ce soir-là dans la rade
de Livourne il y a un trafic intense de navires militaires et militarisés des
États-Unis, engagées dans le transbordement d’armes USA, dont une partie est secrètement envoyée en
Somalie, Croatie et autres zones, sans exclure des dépôts de Gladio en Italie.
Quand survient la collision, ceux qui dirigent l’opération -certainement le
commandement USA de Camp Darby- essaient immédiatement d’effacer toute preuve.
À
Lago Patria (Naples) se trouve le siège du Commandement de la Force Conjointe
Alliée (JFC Naples). Son nouveau quartier général, inauguré en 2012, a une
superficie couverte de 85 mille mètres2, entourée d’une vaste aire clôturée
disponible pour de futures expansions. Le personnel, en augmentation, est
composé de plus de 2.500 militaires et civils. Le JFC Naples de l’Otan est sous
les ordres d’un amiral étasunien, qui commande en même temps les Forces Navales
USA en Europe (dont dépend la Sixième Flotte dotée d’armes nucléaires) et les
Forces Navales USA pour l’Afrique.
Tous les deux ans le JFC Naples assume le
commandement opérationnel de la “Force de riposte Otan” (NRF), une force
conjointe “hautement flexible et compétente” composée de 40 mille militaires,
qui a la mission de conduire des opérations militaires dans l’”aire de responsabilité
du Commandant Suprême Allié en Europe et au-delà de cette aire”. Le fer de
lance de la NRF est sa “Task Force Conjointe à Très Haute Rapidité
Opérationnelle” qui, composée de 5 mille hommes, peut être projetée en 2-3
jours dans l’aire d’intervention “avant que la crise ne commence”.
Au quartier général de Lago Patria est en
fonction, depuis septembre 2017, le “Hub de Direction Stratégique Otan pour le
Sud” (NSD-S Hub) , un centre d’intelligence, c’est-à-dire d’espionnage,
“concentré sur les régions méridionales comprenant Moyen-Orient, Afrique du
Nord et Sahel, Afrique Subsaharienne et aires adjacentes”.
En Sicile, la Naval Air Station (NAS)
Sigonella, avec un personnel d’environ 7.000 militaires et civils, constitue la
plus grande base navale et aérienne USA et Otan de la région méditerranéenne.
En plus de fournir un appui logistique à la Sixième Flotte, elle constitue la
base de lancement d’opérations militaires (en grande partie secrètes)
principalement, mais pas uniquement, au Moyen-Orient et en Afrique. La NAS -lit-on dans la présentation officielle-
“héberge des avions USA et Otan en tous genres”. Parmi ceux-ci, des
drones-espions Global Hawk, qui de Sigonella effectuent des missions de
reconnaissance sur Moyen-Orient, Afrique, Ukraine orientale, Mer Noire et
d’autres zones. Pour des attaques ciblées (presque toujours
secrètes) décollent de Sigonella des drones Predator, armés de missiles et
bombes à guidage laser et satellite.
La Naval Air Station Sigonella est intégrée
par la base italienne d’Augusta, qui fournit combustible et munitions aux
unités navales USA et Otan, et par le port de Catane, capable d’accueillir
jusqu’à neuf navires de guerre. Pour les exercices à feu, les forces spéciales
étasuniennes disposent du polygone de Pachino (Syracuse), concédé en usage
exclusif aux États-Unis.
L’autre
plus grande installation étasunienne en Sicile est la station MUOS de Niscemi (Caltanisetta). Le MUOS (Mobile User
Objective System) est un système de communications satellites militaires à très
haute fréquence, composé de quatre satellites et quatre stations terrestres :
deux en territoire étasunien, en Virginie et à Hawaï, une en Australie et une
en Sicile, chacune dotée de trois grandes antennes paraboliques de 18 mètres de
diamètre. Ce système permet au Pentagone de relier à un seul réseau de
commandement et communications des sous-marins et navires de guerre,
chasseurs-bombardiers et drones, véhicules militaires et détachements
terrestres, pendant qu’ils sont en mouvement dans n’importe quelle partie du
monde.
En Sardaigne se trouvent les plus grands polygones pour l’entraînement
des forces militaires italiennes et Otan : en particulier ceux de Salto di
Quirra, Capo Teulada, Capo Frasca et Capo San Lorenzo. On
utilise là, dans des exercices à feu, environ 80% des bombes, des têtes
missiles et des projectiles employés dans les manoeuvres militaires qui se
déroulent en Italie, avec des conséquences dramatiques pour la santé des
populations.
C’est un des nombreux cas où l’appareil
militaire contribue lourdement à un des plus grands problèmes de notre époque,
la crise environnementale, une des principales menaces contre la sécurité des
peuples et contre nos vies. Bien
qu’il y ait d’innombrables conférences sur l’environnement, aucune attention
n’est portée à l’impact des guerres et des essais militaires et sur leurs
implications pour l’environnement et pour les humains. Il suffit de penser aux
2.024 explosions nucléaires expérimentales nucléaires effectuées entre 1945 et
1991, dont 528 dans l’atmosphère et 1.496 souterraines, pour une puissance
équivalente à plus de 30.000 bombes d’Hiroshima. La dévastation de vastes
aires de territoire démontre de façon dramatique l’impact que les bases
militaires, surtout les polygones de tir, exercent que l’environnement et la
santé des populations.
12.
USA et Otan rejettent le Traité ONU et déploient en Europe de nouvelles armes
nucléaires
Le
20 septembre -le jour-même où aux Nations Unies est ouvert à la signature le
Traité sur la prohibition des armes nucléaires- l’Otan le rejette bruyamment.
Le Traité, voté à l’Assemblée Générale par une majorité de 122 États, engage
les États signataires à ne pas produire ni posséder des armes nucléaires, à ne
pas les utiliser ni menacer de les utiliser, à ne pas les transférer ni à les
recevoir directement ou indirectement, avec l’objectif de leur totale
élimination.
Le Conseil Atlantique-nord (formé par les
représentants des 29 États membres) soutient que “le Traité ne sera pas
effectif, n’augmentera pas la sécurité ni la paix internationales, mais risque
de faire l’opposé en créant des divisions et des divergences”. Il clarifie ensuite sans demi-mots : “nous
n’accepterons aucun argument contenu dans le Traité”.
Le
Conseil Atlantique-nord dépossède ainsi de leur autorité les parlements
nationaux des pays membres, en les privant de la souveraineté de décider de
façon autonome d’adhérer ou pas au Traité Onu sur l’abolition des armes
nucléaires. Il annonce en outre que “nous appellerons nos partenaires et tous
les pays ayant l’intention d’appuyer le traité à réfléchir sérieusement sur ses
implications” (lire : nous les ferons chanter pour qu’ils ne le signent ni le
ratifient). Le Conseil Atlantique-nord rappelle que le “but fondamental de la
capacité nucléaire de l’Otan est de préserver la paix et décourager l’agression”
et que “tant qu’existeront des armes nucléaires, l’Otan restera une alliance
nucléaire”.
Le
Conseil Atlantique-nord assure cependant le “fort engagement de l’Otan pour la
pleine application du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP)”. En
réalité c’est justement par l’Otan que celui-ci est violé. Les États-Unis
-violant l’Article 1 qui interdit aux États militairement nucléaires de
transférer à d’autres des armes nucléaires- ont déployé des bombes nucléaires
B61 dans cinq pays membres de l’Alliance : Italie, Allemagne, Belgique,
Hollande et Turquie. Ceux-ci violent le TNP, qui à l’Article 2 interdit aux
États militairement non nucléaires de recevoir des armes nucléaires, ou d’avoir
le contrôle sur de telles armes directement ou indirectement.
Une nouvelle bombe nucléaire étasunienne, la
B61-12, remplacera à partir de 2020 la B61 aujourd’hui déployée en Italie et
dans d’autres pays européens. La B61-12 a une tête nucléaire à quatre options
de puissance sélectionnantes : au moment du lancement, on choisit la puissance
de l’explosion nucléaire en fonction de l’objectif à frapper. À la différence
de la B61 larguée à la verticale sur l’objectif, la B61-12 est lancée à
distance et guidée par un système satellite. Elle a en outre la capacité de
pénétrer dans le sous-sol, même à travers du béton armé, en explosant en
profondeur pour détruire les bunkers des centres de commandement et autres
structures souterraines, afin de “décapiter” le pays ennemi dans une première
frappe nucléaire.
Le
programme du Pentagone prévoit la construction d’environ 500 B61-12, avec un
coût estimé à environ 10 milliards de dollars (c’est-à-dire que chaque bombe
revient au double de ce qu’elle coûterait si elle était construite entièrement
en or). La dangerosité de cette nouvelle arme est mise évidence même par le
général James Cartwright, ancien chef du Commandement Stratégique des
États-Unis, responsable des armes nucléaires : “Des armes nucléaires de plus
petite puissance et plus précises augmentent la tentation de s’en servir, y
compris de s’en servir les premiers plutôt qu’en représailles”.
Des
photos satellites montrent qu’ont été effectués des travaux de restructuration
pour augmenter la “sécurité” des bases d’Aviano et Ghedi Torre en vue de
l’installation des B61-12. Des travaux analogues ont été effectués dans la base
aérienne allemande de Buchel, dans deux autres bases en Belgique et Pays-Bas,
et dans celle d’Incirlik en Turquie. La B61-12 peut être larguée par des
chasseurs F-16 et Tornado mais, pour exploiter entièrement les capacités de la
bombe il faut des avions étasuniens dotés de systèmes digitaux spéciaux : les
chasseurs F-35A, que reçoit aussi l’Aéronautique italienne.
Le fait que, à l’exercice Otan de guerre
nucléaire qui s’est déroulé en 2014 à Ghedi, prennent aussi part, pour la
première fois, des pilotes polonais indique que les B61-12 seront aussi
déployées en Pologne et dans d’autres pays de l’Est. Des chasseurs Otan à
double capacité conventionnelle et nucléaire sont déjà déployés dans les
républiques baltes, au bord de la Russie.
En
même temps USA et Otan étendent sur l’Europe le “bouclier anti-missile”. En mai
2016, dans la base aérienne de Deveselu en Roumanie, est inaugurée la Aegis
Ashore, la première installation terrestre du système de missile Aegis Ashore
des États-Unis sur le territoire européen. Le secrétaire général de l’Otan Jens
Stoltenberg remercie les États-Unis parce qu’avec une telle installation, « la
première de son genre avec une base à terre », ils accroissent notablement la
capacité de « défendre les alliés européens contre des missiles balistiques
venant de l’extérieur de l’aire Euro-Atlantique ». Il annonce ensuite le début
des travaux pour réaliser en Pologne, d’ici 2018, une autre « Aegis Ashore »,
analogue à celle qui est entrée en fonction en Roumanie. Les deux
installations terrestres s’ajoutent à quatre navires de guerre dotés de radars
Aegis et de missiles SM-3 lesquels, déployés par la U.S. Navy dans la base
espagnole de Rota, croisent en Méditerranée, Mer Noire et Mer Baltique. La U.S. Navy a déjà environ 30 navires de ce type.
Les navires comme les installations terrestres Aegis sont dotés de
lanceurs verticaux Mk41 de Lockheed Martin, c’est-à-dire des tubes verticaux
d’où sont lancés les missiles intercepteurs. C’est ce qui est appelé « bouclier
», dont la fonction est en réalité offensive. Si les USA réussissaient à
réaliser un système fiable capable d’intercepter les missiles balistiques, ils
pourraient tenir la Russie sous la menace d’une première frappe nucléaire, en
se fiant à la capacité du « bouclier » de neutraliser les effets de
représailles. Les lanceurs verticaux du “bouclier”, en plus des missiles
intercepteurs, peuvent lancer aussi d’autres missiles. La firme Lockheed Martin
même souligne que ce système est en mesure de lancer “des missiles pour toutes
les missions”, y compris” ceux pour l’attaque à longue portée”, comme “les
missiles de croisière Tomahawk ». Ceux-ci peuvent être armés de
tête conventionnelle (non-nucléaire) ou de tête nucléaire.
On ne peut donc pas savoir quels missiles il
y a réellement dans les lanceurs verticaux des bases en Roumanie et en Pologne
et dans ceux qui sont à bord des navires qui croisent à la limite des eaux
territoriales russes. Ne pouvant pas contrôler, Moscou considère qu’il y a
aussi des missiles d’attaque nucléaire. Le déploiement de lanceurs verticaux Mk
41 au bord du territoire russe viole ainsi le Traité sur les forces nucléaires
intermédiaires (FNI), stipulé par les USA et l’URSS en 1987.
13.
USA et Otan enterrent le Traité FNI
Les États-Unis annoncent en février
2019 la “suspension” du Traité FNI avec la Russie et leur intention d’en sortir
définitivement dans un délai de six mois. Ils se considèrent donc libres
de tester et déployer des armes de la catégorie interdite par le Traité :
missiles nucléaires à portée courte et intermédiaire (entre 500 et 5500 Km),
avec base à terre. C’est à cette catégorie qu’appartenaient les Pershing 2 et
les Cruise déployés par les USA dans les années Quatre-Vingt dans des pays européens
de l’Otan et les SS-20 installés par l’Union Soviétique sur son propre
territoire, éliminés par le Traité sur les forces intermédiaires (FNI) signé en
1987 par les présidents Gorbachev et Reagan.
Le Traité FNI est mis en question par
Washington quand les États-Unis voient
diminuer leur avantage stratégique sur la Russie et la Chine. En 2014,
l’administration Obama accuse la Russie, sans apporter la moindre preuve,
d’avoir expérimenté un missile de croisière appartenant à la catégorie
interdite par le Traité et, en 2015, elle annonce que “devant la violation du
Traité FNI par la Russie, les États-Unis sont en train de considérer le
déploiement en Europe de missiles avec base à terre”. Le plan est confirmé par
l’administration Trump : en 2018 le Congrès autorise le financement d’”un
programme de recherche et de développement d’un missile de croisière lancé du
sol par plate-forme mobile sur route”. De son côté Moscou nie que son missile
de croisière viole le Traité et, à son tour, accuse Washington d’avoir installé
en Pologne et Roumanie des rampes de lancement de missiles intercepteurs (ceux
du “bouclier”), qui peuvent être utilisées pour lancer des missiles de
croisière à tête nucléaire.
Il faut dans ce cadre rappeler le facteur
géographique : tandis qu’un missile nucléaire étasunien à portée intermédiaire,
basé en Europe, peut atteindre Moscou, un missile analogue basé par la Russie
sur son propre territoire peut atteindre les capitales européennes, mais pas
Washington. Si l’on renverse le scénario, c’est comme si la Russie installait
au Mexique ses missiles nucléaires à portée intermédiaire.
Le plan USA d’enterrer le Traité FNI est
pleinement soutenu par les alliés européens de l’Otan. Le Conseil de
Atlantique-Nord déclare, en décembre 2018, que “ le Traité FNI est en danger à
cause des actions de la Russie”, accusée de déployer “un système de missiles
déstabilisant”. C’est le Conseil de l’Atlantique-Nord même qui déclare en
février 2019 son “plein appui à l’action des États-Unis de suspendre ses
obligations concernant le Traité FNI” et intime à la Russie d’ “utiliser les
six mois restants pour revenir à la pleine observance du Traité”.
L’enterrement du Traité FNI a reçu aussi la
contribution de l’Union Européenne qui, à l’Assemblée Générale des Nations
Unies, en décembre 2018, vote contre la résolution présentée par la Russie sur
la “Préservation et la mise en oeuvre du Traité FNI”, rejetée avec 46 votes
contre 43 et 78 abstentions. L’Union européenne -dont 21 des 27 membres font
partie de l’Otan (comme en fait partie la Grande-Bretagne sortant de l’Ue)-
s’est ainsi uniformisée totalement avec la position de l’Otan, qui à son tour
s’est uniformisée avec celle des États-Unis. En substance, donc, l’Union européenne aussi a donné
son feu vert à une possible installation de nouveaux missiles nucléaires USA en
Europe, Italie comprise.
Une fois
de plus est ignoré l’avertissement lancé par le Président Vladimir Poutine en
février 2019 : “La Russie sera contrainte à créer et déployer des systèmes d’arme
qui peuvent être utilisés non seulement contre les territoires d’où provient
cette menace directe, mais aussi contre ces territoires où sont situés certains
centres décisionnels desquels peut provenir l’ordre d’utiliser ces armes contre
nous”. Autrement dit, si les États-Unis déploient en Europe des missiles
nucléaires à portée intermédiaire pointés sur la Russie, la Russie déploiera
sur son propre territoire des missiles nucléaires pointés sur les territoires
européens où sont déployés les missiles USA et, en même temps, contre les
territoires étasuniens où se trouvent les centres de commandement et de
contrôle de ces missiles.
14.
L’empire Américain d’Occident joue la carte de la guerre
Un arc très large de tensions et conflits
croissants s’étend de l’Asie Orientale à l’Asie Centrale, du Moyen-Orient à
l’Europe et de l’Afrique à l’Amérique Latine. Les “points chauds” le long de
cet arc intercontinental -Péninsule Coréenne, Mer de Chine Méridionale,
Afghanistan, Syrie, Irak, Iran, Ukraine, Libye, Venezuela et autres- ont des
histoires et caractéristiques géopolitiques différentes, avec des facteurs
socio-économiques intérieurs spécifiques, mais sont en même temps reliés à un
facteur unique : la stratégie avec laquelle les États-Unis d’Amérique essaient
de garder leur position de super-puissance dominante.
Les États-Unis sont encore la première
puissance économique du monde, surtout grâce aux capitaux et aux mécanismes
avec lesquels ils dominent le marché financier global, aux multinationales avec
lesquelles ils exploitent ressources
humaines et matériaux de tous les continents, aux hautes technologies et
brevets correspondants en leur possession, au rôle envahissant de leurs groupes
multimédias qui influencent les opinions et les goûts de milliards
d’utilisateurs à l’échelle planétaire.
Mais leur suprématie est mise en danger par
l’émergence de nouveaux sujets étatiques et sociaux. Ce qui est mis en question
par Russie, Chine et autres pays n’est pas seulement le pouvoir exorbitant du
pétrodollar (monnaie de réserve provenant de la vente de pétrole), mais
l’hégémonie même du dollar. Sa valeur est déterminée non pas par la réelle
capacité économique étasunienne, mais par le fait qu’il constitue quasiment les
deux tiers des réserves monétaires mondiales et la monnaie par laquelle on
établit sur les marchés mondiaux le prix du pétrole, de l’or, des autres
matières premières et des marchandises en général.
Ceci permet à la Federal Reserve, la Banque
Centrale (qui est une banque privée), d’imprimer des milliers de milliards de
dollars avec lesquels est financée la colossale dette publique USA -environ 23
mille milliards de dollars- par l’intermédiaire de l’achat d’obligations et
autres titres émis par le Trésor. Dans ce cadre, la décision du Venezuela en
2017 de découpler le prix du pétrole du dollar et de le lier à celui du yuan
chinois provoque une secousse qui fait trembler tout l’édifice impérial fondé
sur le dollar. Si l’exemple du Venezuela se répandait, si le dollar cessait
d’être la monnaie dominante du commerce et des réserves monétaires
internationales, une immense quantité de dollars serait injectée sur le marché
en faisant s’écrouler la valeur de la monnaie étasunienne.
Washington observe avec une préoccupation
croissante surtout le partenariat russo-chinois : les échanges entre les deux
pays sont en forte augmentation ; augmentent en même temps les accords de
coopération russo-chinois dans les domaines énergétique, agricole, aéronautique,
spatial et dans celui des infrastructures. La fourniture de gaz russe à la
Chine à travers le nouveau gazoduc Sila Sibiri, à partir de 2019, ouvre à
l’export énergétique russe la route vers l’Est pendant que les USA essaient de
lui bloquer la voie à l’Ouest vers l’Europe.
Au Moyen-Orient, en plus de son intervention
militaire qui bloque le plan USA/Otan de démolir l’État syrien, la Russie
utilise des instruments économiques, en établissant en 2017 des accords avec
l’Iran pour la réalisation d’infrastructures ferroviaires et énergétiques,
parmi lesquelles un gazoduc entre l’Iran et l’Inde fortement controversé par
les USA. Washington répond par une manoeuvre précédemment mise au point avec
Israël : le président Trump attaque violemment l’Iran, en l’accusant de violer
“l’esprit” de l’accord sur le nucléaire stipulé par Téhéran en 2015 avec le
Groupe 5+1 (USA, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Chine et Russie). Bien que
l’Agence Internationale pour l’Énergie Atomique même garantisse que l’Iran respecte
l’accord et n’est pas en train de tenter de fabriquer des armes nucléaires, la
question est artificiellement ré-ouverte en lançant un processus périlleux à
l’issue imprévisible. L’attaque de Washington est dirigée non seulement contre
l’Iran mais contre la Russie qui est en train de réaffirmer sa présence au
Moyen-Orient.
“Moscou
-écrit le New York Times en octobre 2017
- tente, à travers la gigantesque compagnie pétrolière d’État Rosneft,
de gagner en influence dans des lieux où les États-Unis ont trébuché. Le plus
gros pari est le Venezuela. En trois années la Russie et Rosneft ont fourni à
Caracas une assistance financière pour 10 milliards de dollars, aidant le
Venezuela à éviter le défaut. La Russie utilise de plus en plus le pétrole
comme instrument et défie les intérêts des États-Unis”.
Un défi croissant aux intérêts des États-Unis vient en même temps de la
Chine. Premier exportateur mondial de marchandises, elle est montée, en revenu
national brut, au deuxième rang mondial après les États-Unis et enregistre des
taux de croissance économique supérieurs aux étasuniens. Le
projet le plus ambitieux, lancé par la Chine en 2013 et partagé par la Russie,
est celui d’une nouvelle Route de la Soie : un réseau routier et ferroviaire
qui relie la Chine à l’Europe à travers l’Asie Centrale et Occidentale et à
travers la Russie, à peu près le long du parcours de l’antique Route de la
Soie. Le projet, déjà en phase de réalisation, prévoit, conjointement à la voie
terrestre, une voie maritime à travers l’Océan Indien, la Mer Rouge et la
Méditerranée. Pour les infrastructures
routières et ferroviaires, qui devraient traverser et relier plus de 60 pays,
sont prévus des investissements pour plus de 1.000 milliards de dollars. Le
projet, qui n’inclut pas de composantes militaires, n’est pas simplement
économique. S’il était réalisé selon l’idée originelle, il remodèlerait
l’architecture géopolitique de toute l’Eurasie, créant sur la base de
convenances réciproques un nouveau réseau de rapports économiques et politiques
entre les États du continent.
L’élan pour remodeler l’ordre économique
mondial ne vient pas que de grands sujets étatiques, comme la Chine et la
Russie, qui veulent un monde non plus unipolaire mais multipolaire. Il vient
aussi, en de multiples formes et degrés de conscience, d’immenses sujets
sociaux, milliards d’êtres humains qui, sur chaque continent, subissent les
conséquences de l’actuel ordre économique mondial. C’est-à-dire une
mondialisation économique axée sur la recherche du profit maximal laquelle,
tandis qu’elle abat d’un côté les frontières pour que capitaux et productions
puissent circuler librement, de l’autre érige d’autres frontières, invisibles
mais non moins concrètes, qui excluent la majorité de la population mondiale
des bénéfices de cette croissance économique construite avec les ressources
humaines et matérielles du monde entier. Ce système crée dans le monde une
polarisation croissante entre richesse et pauvreté. Plus de 85% de la richesse
mondiale (en termes d’argent et de propriété) sont concentrés dans les mains de
8% de la population adulte mondiale. Les 92% restants possèdent à peine 14% de
la richesse mondiale. Plus de 3 milliards et demi de personnes, qui
représentent presque les trois quarts de la population adulte mondiale
possèdent moins de 2,5% de la richesse mondiale.
Plus de 2 milliards de personnes en Afrique,
Asie et Amérique Latine, surtout dans les zones rurales, vivent dans la
pauvreté ou en tous cas dans des conditions de graves restrictions économiques.
Parmi elles, environ un milliard vit dans une pauvreté extrême, c’est-à-dire
dans une condition sociale caractérisée par une dénutrition chronique, une
situation d’habitation et d’hygiène désastreuse, une incidence élevée de
maladies infectieuses et parasitaires, une mortalité élevée surtout infantile,
une brève durée moyenne de vie, un analphabétisme, un manque de pouvoir
décisionnel, une dépendance, marginalisation, vulnérabilité et constante
insécurité. Des villages de l’Afrique subsaharienne aux bidonvilles asiatiques
et latino-américains, les pauvres vivent le même drame, provoqué par les mêmes
causes de fond.
C’est là l’ordre économique global que les
États-Unis essaient par tous les moyens de conserver et contrôler. Le but
stratégique poursuivi par Washington est clair : se débarrasser de tout État ou
mouvement politique/social qui puisse nuire aux intérêts fondamentaux
politiques, économiques et militaires des États-Unis d’Amérique, en mettant en
danger leur suprématie. Dans cette stratégie ils sont accompagnés par les
puissances européennes de l’Otan et par d’autres, comme Israël et le Japon,
lesquels, bien qu’ayant des conflits d’intérêts avec les USA, se rangent en
ordre compact derrière le leadership étasunien quand il s’agit de défendre l’ordre
économique et politique dominé par l’Occident. N’ayant pas la force économique
de le faire, les États-Unis et leurs
alliés jouent de plus en plus la carte de la guerre.
En plus des guerres proprement dites,
Washington mène de façon croissante des “guerres non-conventionnelles” à
travers des “opérations couvertes”, c’est-à-dire secrètes. C’est la Communauté
d’intelligence qui s’en occupe, formée de 17 organisations fédérales . En plus
de la CIA (Agence Centrale d’Intelligence) il y a la DIA (Agence d’Intelligence
de la Défense), mais chaque secteur des Forces armées -armée, aéronautique,
marine, corps des marines- a son propre service secret. Comme l’ont le
Département d’état et celui de la Sécurité de la patrie. Parmi ces services, en
âpre compétition entre eux pour s’accaparer des appuis politiques et des fonds
fédéraux, joue un rôle capital la NSA, l’Agence pour la sécurité nationale,
spécialisée dans les interceptions téléphoniques et informatiques, à travers
lesquelles sont espionnés non seulement les ennemis mais aussi les amis des
États-Unis, comme le confirme le “datagate” suscité par les révélations de
l’ex-contractuel Edward Snowden.
Les actions sur le terrain sont effectuées
par l’USSOCOM, le Commandement des forces spéciales, qui dispose de dizaines de
milliers de commandos des quatre secteurs des forces armées. D’après une enquête du Washington Post , les forces
pour les opérations spéciales sont déployées dans 75 pays. L’USSOCOM emploie
aussi des compagnies militaires privées. Dans l’aire du Commandement Central
USA, comprenant aussi Irak et Afghanistan, les contractor (mercenaires) du
Pentagone sont plus de 150 mille. S’y ajoutent ceux embauchés par d’autres
départements et par les armées alliées, dont le nombre est inconnu, mais certainement
élevé. Tous appartiennent à l’armée de l’ombre privée, qui jouxte l’armée
officielle.
À ceci s’ajoute l’”armée humanitaire” formée par toutes ces
“organisations non-gouvernementales” qui, dotées de moyens énormes, sont
utilisées par la CIA et le Département d’État pour des actions de
déstabilisation interne au nom de la “défense des droits des citoyens”. Dans ce
même cadre entre l’action du groupe de Bilderberg -que le magistrat Ferdinando
Imposimato dénonce comme “un des responsables de la stratégie de la tension et
des massacres” en Italie- et celle du groupe de l’Open Society de
l’”investisseur et philanthrope George Soros”, artisan des “révolutions
colorées”.
Les États-Unis -qui depuis 1945 ont provoqué par leurs guerres et leurs
coups d’état 20-30 millions de morts (plus des centaines de millions causés par
les effets indirects de ces actions)- sont prêts à tout pour conserver la
supériorité militaire sur laquelle est fondé leur empire, qui est en train de
s’effriter avec l’émergence d’un monde multipolaire. Dans le cadre de cette
stratégie, les décisions politiques sont prises avant tout dans l’”État
profond”, centre souterrain du pouvoir réel détenu par les oligarchies
économiques, financières et politiques.
15. Le système planétaire USA/Otan
Dans la “géographie” du Pentagone, le
monde se trouve divisé en “aires de responsabilité”, chacune confiée à un des
six Commandements Combattants Unifiés des États-Unis : le Commandement Nord
couvre l’Amérique du Nord ; le Commandement Sud, l’Amérique centrale et du sud
; le commandement Européen, la région comprenant l’Europe et toute la Russie ;
le commandement Afrique, pour le continent africain (sauf l’Égypte qui entre
dans l’aire du Commandement Central) ; le Commandement Central, pour le
Moyen-Orient et l’Asie Centrale ; le Commandement Pacifique, pour la région
Asie/Pacifique.
Chacun des Commandements Combattants Unifiés est composé des
commandements des différents composantes des Forces armées USA de cette aire.
Par exemple, le Commandement Européen des États-Unis est formé de : Armée USA
en Europe, Forces Aériennes USA en Europe, Forces Navales USA en Europe, Forces
Marines USA en Europe, Commandement des Opérations Spéciales USA en Europe. Le
commandement de chaque force est articulé, à son tour, à une série de
sous-commandements et unités. Par exemple, l’Armée USA en Europe en a 22.
Aux six commandements géographiques s’ajoutent trois opérationnels à
l’échelle mondiale : le Commandement Stratégique, responsable des forces
nucléaires terrestres, aériennes et navales, des opérations militaires dans
l’espace et cyberespace, de l’attaque globale, de la guerre électronique et de
la défense par missile ; le Commandement pour les Opérations Spéciales, avec un
commandement spécifique dans chacune des six aires plus un en Corée,
responsable de la guerre non-conventionnelle, des opérations de
contre-insurrection, des opérations psychologiques et de toute autre mission
ordonnée par le Président ou le Secrétaire à la Défense ; le Commandement pour
le Transport, responsable de la mobilité des soldats et armements via terre,
air et mer au niveau mondial.
Les États-Unis d’Amérique sont l’unique pays à avoir une présence
militaire à l’échelle mondiale, dans
tous les continents et régions du monde. Le Pentagone est directement
propriétaire de plus de 4.800 bases et autres installations militaires, aux
États-Unis ou à l’étranger, comprenant plus de 560.000 bâtiments et structures
(type voies ferrées, oléoducs et pistes aéroportuaires) . Les États-Unis ont,
d’après les données officielles du Pentagone, environ 800 bases et autres
installations militaires dans plus de 70 pays, surtout autour de la Russie et
de la Chine, plus de nombreuses autres en fonction ou secrètes. Ces
bases servent à une rotation continue de forces, qui peuvent être rapidement
augmentées avec celles transférées des bases aux États-Unis pour les concentrer
dans des théâtres de guerre déterminés. Les pays où sont déployés des troupes
étasuniennes, y compris ceux où les USA n’ont pas de bases militaires, sont
plus de 170. En terme de comparaison, la Russie n’a qu’une dizaine de bases
militaires à l’étranger, dans les ex-républiques soviétiques ; la Chine en a
une à Djibouti, où font escale ses navires militaires et civils.
Dans le sillage des États-Unis opère l’Otan,
l’alliance sous commandement USA qui désormais n’a plus de frontières. En
Europe -après s’être étendue dans l’aire de l’ex-Pacte de Varsovie, de
l’ex-URSS et de l’ex-Yougoslavie- elle est de fait en train d’incorporer
l’Ukraine. En Asie Centrale l’Otan est en train d’incorporer la Géorgie qui,
déjà intégrée dans ses opérations, est candidate à devenir complètement membre
de l’Alliance. L’Otan continue en outre à “approfondir la coopération” avec
Kazakstan, Kirghizistan, Tajikistan, Turkmenistan et Ouzbekistan, pour faire
opposition à l’Union Économique Eurasiatique (comprenant Russie, Biélorussie,
Kazakstan, Arménie et Kirghizistan). Elle este en outre engagée en Afghanistan,
pays de grande importance géostratégique à l’égard de la Russie et de la Chine.
En
Asie Occidentale, l’Otan poursuit l’opération militaire couverte contre la
Syrie et en prépare d’autres (l’Iran est toujours dans le viseur). En même
temps elle renforce son partenariat (qui a fait ses preuves dans la guerre
contre la Libye) avec quatre monarchies du Golfe -Bahrein, Émirats Arabes Unis,
Koweit, Qatar- et la coopération militaire avec l’Arabie Saoudite qui commet
des massacres au Yemen avec des bombes à fragmentation fournies par les USA. En
Asie Orientale, l’Otan a conclu avec le Japon un accord stratégique qui
“élargit et approfondit le long partenariat”, auquel se joint un accord
analogue avec l’Australie, dans une fonction anti-russe et anti-chinoise. Dans
le même objectif les plus grands pays de l’Otan (dont l’Italie) participent
tous les deux ans, dans le Pacifique, à ce que le commandement de la Flotte USA
définit comme “le plus grand exercice maritime du monde”.
En Afrique, après avoir démoli la Libye, l’Otan est en train d’augmenter
l’assistance militaire à l’Union africaine, à qui elle fournit aussi
“planification et transport aéronaval”, dans le cadre stratégique du Commandement
Afrique des États-Unis. En Amérique Latine, l’Otan a stipulé un “Accord sur la
sécurité” avec la Colombie qui, déjà engagée dans des programmes militaires de
l’Alliance (parmi lesquels la formation de forces spéciales), est devenue ”le
premier partenaire de l’Otan en Amérique Latine”. L’Otan
est donc à l’oeuvre dans le plan de subversion contre la République
Bolivarienne du Venezuela.
16.
Pour sortir du système de guerre sortir de l’Otan
L’accélération
en acte des conflits fait augmenter le risque d’une grande guerre qui, avec l’emploi
des armes nucléaires et autres armes de destruction de masse, mettrait en péril
l’existence même de l’Humanité et de la Planète Terre. Il est d’une importance
vitale de multiplier les efforts pour sortir du système de guerre. Ceci pose la
question de l’appartenance de l’Italie à l’Otan.
Certains prétendent qu’on peut rester dans
l’Otan en conservant sa propre autonomie de choix, c’est-à-dire en ayant la
possibilité de décider d’une fois sur l’autre au parlement national de
participer ou pas à une initiative particulière de l’Alliance Atlantique.
Illusion ou pire. Dans le Conseil de l’Atlantique-nord, stipulent les règles de
l’Otan, “il n’y a pas de vote ou de décision à la majorité”, mais “les
décisions sont prises à l’unanimité et d’un commun accord” , c’est-à-dire
d’accord avec les États-Unis d’Amérique à qui reviennent de droit la charge de
Commandant Suprême Allié en Europe et les autres commandements clés, y compris
celui du Groupe de planification nucléaire.
Dans le grand spectacle médiatique de la
politique, illusionnistes et funambules lancent des appels pour un monde sans
armes nucléaires : c’est-à-dire pour quelque chose qui est actuellement
impossible, mais ils ne font rien pour réaliser ce qui par contre serait
aujourd’hui possible : une bataille résolue pour libérer l’Italie des armes
nucléaires, qui ne servent pas à notre sécurité mais nous exposent à des
risques croissants. C’est la seule façon par laquelle, en Italie, on peut
réellement contribuer à désamorcer l’escalade qui nous amène à la guerre
nucléaire, en accomplissant un réel pas en avant vers l’élimination complète
des armes nucléaires.
Pour cela, il faut se battre à découvert
pour que l’Italie cesse de violer le Traité de non-prolifération qu’elle a
ratifié, en imposant aux États-Unis de retirer immédiatement leurs armes
nucléaires de notre territoire national, et en même temps pour que l’Italie, en
s’en libérant, adhère au Traité des Nations Unies sur l’interdiction des armes
nucléaires.
Les principes de notre Constitution et les
réels intérêts nationaux rendent en même temps indispensable le retrait de
notre territoire national non seulement des armes nucléaires, mais des bases
USA et de celles de l’Otan sous commandement USA. Autrement dit, il faut briser
le Grand Tabou qui domine le monde politique et institutionnel, en indiquant
clairement l’objectif à atteindre : la sortie de l’Italie de l’Otan et de
l’Otan de l’Italie, pour contribuer à la dissolution de l’Alliance Atlantique
et de toute autre alliance militaire. Objectif considéré comme fou pour qui
voit l’Alliance Atlantique comme quelque chose de sacré et intouchable ;
considéré comme dangereux par ceux qui savent que, en s’opposant à l’Otan, ils
mettent en péril leur carrière politique ; considéré comme impossible par ceux
qui pensent qu’une Italie souveraine et neutre ne peut pas exister.
Les obstacles qui entravent la voie vers cet
objectif sont gigantesques. Le Pouvoir dominant fonde sa force non seulement
sur des instruments politiques, économiques et militaires, mais sur le contrôle
des esprits, rendu possible par un appareil médiatique omniprésent qui, surtout
à travers la télévision, induit à croire que n’existe que ce qui se voit et que
ce qui ne se voit pas n’existe pas. Le contrôle des esprits à travers
l’appareil médiatique permet, d’une part, de tranquilliser l’opinion publique
en cachant les menaces réelles, d’autre part de l’alarmer en faisant apparaître
à tour de rôle des hologrammes de dangereux ennemis, afin de justifier les
politiques de réarmement, opérations militaires et guerres. En justifiant en
même temps une dépense militaire qui en Italie se monte à environ 70 millions
d’euros par jour et, selon les engagements pris dans l’Otan, devra aller
jusqu’à 100 millions d’euros par jour. Et, toujours dans le but de contrôler
les esprits, on crée le spectacle : ceux qui ont soutenu les guerres
démolissant des États entiers (en dernier, l’État libyen), et provoquant de
dramatiques exodes de masse, sont aujourd’hui au premier rang pour accueillir à
bras ouverts les victimes de ces mêmes guerres.
L’écrasante majorité des gens ne sait donc
rien ou presque rien des mécanismes qui déterminent l’escalade guerrière de
plus en plus rapide, rendant toujours plus réel le scénario de la troisième (et
ultime) guerre mondiale : la guerre
thermonucléaire. On en parle dans des cercles restreints de “spécialistes”,
dans des “salons gris” (par référence à la couleur des cheveux) desquels les
jeunes sont largement absents. Il s’agit de sortir du huis clos, en trouvant
les moyens et langages pour faire comprendre aux gens que le temps presse,
qu’il faut absolument agir alors qu’il en est encore temps. Que faire est dans
les mains de chacun de nous.
Face au danger qui menace, nous devons
montrer qu’existe encore une Italie qui se souvient, pas seulement en paroles,
de sa Constitution ; une Italie pour laquelle le mot “souveraineté” n’est pas
qu’un terme d’usage politique à court
terme ; une Italie capable de sortir de l’anti-historique vision d’un Occident
retranché dans la défense de sa suprématie ; une Italie capable de jouer un
rôle actif dans la construction d’un monde multipolaire dans lequel se
réalisent les aspirations des peuples à la liberté et à la justice sociale sur
la base de la Déclaration Universelle des Droits Humains.
GROUPE DE TRAVAIL:
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Francesco Cappello, Giulietto Chiesa, Franco Dinelli, Manlio Dinucci, Berenice Galli, Allemagne Leoni von Dohnanyi, Jeff Hoffman, Giuseppe Padovano, Marie-Ange Patrizio, Jean Toschi M. Visconti, Luisa Vasconcelos, Fernando Zolli
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- Jeff Halper, La guerra contro il popolo, edizioni epoké, 2017
- Russia Insider, Putin/Xi Plan to Bypass the Dollar Is a True Bombshell - A Report From the BRICS Summit, 8 settembre 2017
- Il Sole 24 Ore, La Cina prepara la sfida ai petrodollari, 7 settembre 2017
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- United Nations General Assembly, Treaty on the Prohibition of Nuclear Weapons, 7 luglio 2017
- Michel Chossudodovsky, Towards a World War III Scenario, Global Research, 2012
- Jean Toschi Marazzani Visconti, Il Corridoio / Viaggio nella Jugoslavia in guerra, La Città del Sole, 2006 / La Porta d’ingresso dell’Islam / Bosnia Erzegovina:un paese ingovernabile, Zambon Editore, 2016
- Giulietto Chiesa
È arrivata la bufera, Piemme, 2015
Что, вместо катастрофа, Mosca 2016 Putinfobia, Piemme 2016Руссофобия 2.0. Eksmo, Moscow, 2017 Rusofobie 2.0. Editions du Cercle, ParisRusofobija, Albatros, Belgrado, 2016
Caos Globale, Revoluzione Ed., 2017Глобалний Каос, Moscow 2018
Caos Globale, Revoluzione Ed., 2017Глобалний Каос, Moscow 2018
- Manlio Dinucci
Coautore con Daniel Bovet e prefazione di Ernesto Balducci, Tempesta del deserto / Le armi del Nord, il dramma del Sud, Edizioni Cultura della Pace, 1991
Hyperwar, Edizioni Cultura della Pace, 1991
Coautore con U.Allegretti e D.Gallo, La strategia dell’impero / Dalle direttive del Pentagono al Nuovo Modello di Difesa, Edizioni Cultura della Pace, 1992
L’Arte della guerra / Annali della strategia USA/NATO (1990-2016), Zambon Editore, 2016
Diario di guerra, Asterios Editore, 2018
Guerra nucleare - Il giorno prima / Da Hiroshima a oggi: chi e come ci porta alla catastrofe, Zambon Editore, 2017
- Germana Leoni von Dohnanyi, Lo Stato Profondo, Imprimatur, 2017
- Francesco Cappello, Ricchezza fittizia povertà artificiosa, Edizioni ETS, 2018
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