Une
réunion à la Hofburg à Vienne, le 14 juillet 2008, pour marquer le 500e vol qui
approche en vertu du traité Ciel ouvert.
Trump serial
violeur de traités
Le président Trump a
annoncé le retrait des États-Unis du Traité Open Skies (Ciel ouvert).
Signé en 1992 immédiatement après la fin la
Guerre Froide et entré en vigueur en 2002, il permet à chacun des 34
États-partie de survoler les territoires des autres avec des avions de
reconnaissance (non armés), dotés de senseurs pour le recueil de données sur
des forces et activités militaires. Chaque État-partie doit accepter chaque
année un certain nombre de survols de son propre territoire et a le droit d’en
effectuer autant sur les territoires de ceux qui ont accompli ces survols.
Sur la base de ce Traité, depuis 2002, ont été
effectués au total plus de 1.500 survols, y compris ceux réciproques entre
États-Unis et Russie. Même si les satellites peuvent aujourd’hui fournir des
informations plus détaillées que celles recueillies par les avions, le Traité
garde son utilité technique puisque tous les États-Partie ne disposent pas de
capacités satellitaires. Reste importante la signification politique du Traité,
comme acte de distension.
C’est justement ce que cible la décision de
l’administration Trump de se retirer du Traité, dans le but évident d’accroître
la tension avec la Russie. À cette fin a été adopté le même scénario que le 1er
février 2019, quand le secrétaire d’Etat Mike Pompeo annonça que, après six
mois de suspension, les États-Unis se retireraient du Traité sur les Forces
Nucléaires Intermédiaires (FNI), comme en effet il advint en juillet de la même
année. En annonçant que les États-Unis se retireront dans les six mois du
Traité Ciel Ouvert, Mike Pompeo emploie pratiquement les mêmes mots : il
déclare que “la seule Russie porte la responsabilité de ces développements”, il
l’accuse de “continuelle érosion de l’architecture de contrôle des armements”,
la qualifie de “serial violeur de nombreux engagements pris”. Cette fois
aussi aucune réelle preuve n’est apportée pour ces accusations.
En déclarant que “cette histoire ne se réfère
pas exclusivement au Traité Open Skies” le secrétaire d’État pré-annonce
d’autres décisions de l’administration Trump dans la même direction. Depuis
plus d’une année le président Trump répète qu’il ne renouvellera pas le nouveau
Traité Start, conclu en 2010 par États-Unis et Russie. Ce traité, comme nous le
mîmes en évidence en 2010 sur il manifesto, a de nombreuses limites : il
n’établit qu’un plafond pour les “têtes nucléaires déployées”, c’est-à-dire
prêtes au lancement par des vecteurs stratégiques de portée supérieure à 5.500
km, prévu à 1.550 par partie ; il ne prévoit en outre aucun contrôle effectif
sur la montée en puissance qualitative des forces nucléaires. Malgré cela, le
retrait des États-Unis y compris du nouveau Traité Start rendrait la confrontation
nucléaire encore plus dangereuse. Le président Trump a dit qu’il ne pourrait
renouveler le nouveau Traité Start que si la Chine aussi y participait,
possibilité jusqu’à présent refusée par Pékin. Mais quand bien même elle y
participât, la Chine, sur la base des termes actuels, pourrait accroître le
nombre de ses têtes nucléaires d’environ 300 à plus de 1.500 (en excluant
l’hypothèse que Washington et Moscou fussent disposés à diminuer les leurs à
300).
Un autre traité dont les États-Unis
pourraient se retirer est celui sur la totale mise au ban des essais
nucléaires, que Washington a signé en 1996 mais jamais ratifié, alors que
Moscou l’a ratifié en 2000.
Sur un tel fond, le retrait annoncé des
États-Unis du Traité Ciel Ouvert constitue le pas ultérieur d’une véritable
stratégie de la tension. Étant donné qu’adhèrent au Traité 23 pays européens de
l’OTAN, parmi lesquels l’Italie (et la France, ndt), le retrait des
États-Unis, en augmentant la tension avec la Russie, implique automatiquement
l’OTAN. C’est exactement ce qu’on veut à Washington. Dans un communiqué
conjoint publié hier, huit pays OTAN (Belgique, France, Allemagne, Italie,
Luxembourg, Pays-Bas, République Tchèque et Espagne), plus la Finlande et la
Suède, expriment leur “regret” sur l’intention du Gouvernement USA de se
retirer du Traité Ciel Ouvert, “bien que nous partagions ses préoccupations
relatives à la mise en oeuvre des dispositions du Traité par la Fédération de
Russie”. Ils déclarent toutefois que “nous continuerons à mettre en œuvre le
Traité Ciel
Ouvert”. Prudent mais
appréciable signal d’ouverture, tandis que l’ombre menaçante de la guerre
nucléaire s’étend de plus en plus dans les cieux.
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